III® SÉRIE. AVIS. Le titre de ce volume sera donné à la fin avec la table de tous les articles, sans préjudice de la table des matières, qui sera placée à la fin `du volume. Comme les Annales sont lues par beaucoup de personnes, et sont un livre d'usage, nous nous sommes décidés à employer un papier collé, qui permettra d'écrire sur les marges comme sur un papier ordinaire, et un papier mécanique fabriqué exprès, beaucoup plus fort que les papiers ordinaires, comme on peut le voir dans ce n°; c'est une augmentation de dépense que nous faisons volontiers pour l'avantage et la commodité de nos abonnés. IMP. DE HAUQUelin et bautruche, rue de la Harpe, 90. DE PHILOSOPHIE CHRÉTIENNE. Numéro 49. Jawvier 1844. Traditions Primitives. PREUVES DE LA PROPAGATION DE LA RÉVÉLATION PRIMITIVE PARMI LES GENTILS AVANT Zeuxième article 1. « Le Seigneur, nous dit la sainte Écriture, souffla en Adam le » souffle de vie 2...... Il lui montra les biens et les maux ; il ajouta l'in>> struction, et lui donna en héritage la loi de la vie... Ses yeux virent » les merveilles de sa puissance, et son oreille entendit l'honneur de sa » voix 2. » Ainsi, non-seulement Dieu lui fit lire sa loi dans les merveilles qui l'entourent, mais encore, il lui en donna une communica Voir la 3e série, n° 14-15, t. 1, p. 200. Inspiravit in faciem ejus spiraculum vitæ. Gen., 11, 7. 3 Mala et bona ostendit illis...; addidit illis disciplinam et legem vitæ hæreditavit illos... Magnalia honoris ejus vidit oculus illorum et honorem vocis audierunt aures illorum. Ecclésiastique, ch. xvII. tion extérieure en l'honorant du son de sa voix, et cette loi, il la lui confia comme un heritage qu'il devait transmettre à ses descendans. Après la fatale imprudence qui le fit toucher au fruit défendu, Adam reçut de la bouche même de Dieu cette annonce si consolante: que naîtrait de sa race Celui par qui la téte du Serpent séducteur serait écrasée. Ensuite descendirent d'Adam des générations dont le nombre surpasse celui des étoiles du firmament. Elles ont peuplé le monde. Leur commun père, qui fut aussi leur maître, ne leur transmit pas seulement la vie, mais encore, avec la vie, la science. Il leur enseigna, pendant les 930 ans qu'il vécut, la même religion, la même morale qu'il avait apprise de la bouche de son auteur. Il leur raconta et la noble histoire de son origine, et sa chute si déplorable: il leur parla des sacrifices du juste Abel, et de l'impie Caïn; leur apprit l'horrible fratricide de ce dernier, et leur confia le dépôt de la tradition vitale, je veux dire de la promesse du Rédempteur qui viendrait un jour. Cette foi, cette religion, cette histoire, ces traditions (ceci est bien à remarquer), ont pu très aisément, depuis Adam jusqu'à Noé, se transmettre dans les familles, et se conserver intacts; puisque Lamech, père de Noé, a pu vivre avec Adam plus d'un demi-siècle (58 ans), et que Mathusalem, père de Lamech, a pu vivre avec notre premier père deux siècles et demi environ (245 ans). - Ajoutez encore qu'Enoch naquit l'an du monde 622, qu'il marcha devant le Seigneur, disent les saints livres '; que, poussé par l'inspiration du divin esprit, il adressa les menaces les plus terribles aux hommes qui ne marchaient pas, comme lui, dans les voies de Dieu; qu'il leur prédit le dernier jour, le grand jour des vengeances du juge éternel, et qu'il s'écria: « Voilà que le Seigneur arrive avec la multi>>tude de ses saints, pour juger tous les hommes, et convaincre tous » les impies de toutes leurs œuvres d'iniquité, et de toutes les paroles superbes qu'ils ont proférées contre Dieu ?. » A la 365 année de sa vie, >> Gen. v. 22. Prophetavit autem et de his septimus ab Adam Enoch, dicens: Ecce venit Dominus in sanctis millibus suis, facere judicium contra omnes, et arguere 2 Enoch, qui avait vécu avec Noé 113 ans, fut, grâce à sa foi, transporté dans le Paradis, et (selon le texte grec) donné en exemple de pénitence, ou (selon la Vulgate) destiné à prêcher la pénitence aux nations. C'est ainsi que, par ses leçons et par ses exemples, purent revivre la justice, qu'ils avaient négligée depuis quelque tems, et la foi, qui commençait à s'altérer parmi eux. La lumière de la révélation n'a donc été refusée à aucune nation antédiluvienne; mais loin d'être fidèles, comme le fut Noé, à en suivre les saintes inspirations, les hommes se plongèrent dans les plus infâmes voluptés; et leurs forfaits, dont l'odeur exécrable monta jusqu'au trône de Dieu, obligèrent le Tout-Puissant à faire pleuvoir un déluge d'eau, pour laver les hideuses taches qui souillaient la terre '. Voici pourtant que surnagent en paix, portés par les eaux, Noé, et, à cause de lui, sa famille. Avec eux est sauvée la morale, sauvée la foi révélée à Adam, sauvée la science des choses divines acquise par Noé lui-même dans ses entretiens avec Dieu. Ainsi, à ces uniques restes, qui survécurent à tout le genre humain, fut donnée la gloire, non-seulement de repeupler le monde, au moyen de nouvelles géné– rations, mais encore de transmettre, avec la doctrine sainte, les récits utiles conservés par eux. « Noé, dit un ministre protestant irlandais, Noé, qui, lors du déluge, avait 600 ans 3, et qui connaissait bien la Religion, la morale, omnes impios de omnibus operibus impietatis eorum, quibus impiè egerunt et de omnibus duris, quæ locuti sunt contra Deum peccatores impii. Judic. XIV, 14. 1 Gen. VI. Matth. xiv, 37, 38. - Luc. xv, 21. Ed. Ryan, vic. de Donaghmore. Bienfaits de la relig., chret., p. 7,8, traduct. de Boulard, 3° édit. in-8°. Paris, 1823. L'ouvrage a paru en anglais en 1788. 3 Anno sexcentesimo vitæ Noe... rupti sunt omnes fontes Abyssi magnæ. Gen., vII. 11. On lit dans la traduct. de Boulard: Noé qui avait 100 ans lors du déluge. C'est évidemment une erreur typographique; nous la relevons ici, et sommes disposés à en faire autant toutes les fois que l'occasion s'en présentera, parce qu'il est incroyable quel nombre d'erreurs se vulgarisent de nos jours, grâce à la manic de citer des citations qu'on ne prend pas la peine de vérifier. (Note du traducteur.) l'agriculture, ainsi que les arts du monde antediluvien, avait les qualités convenables pour instruire, à cet égard, sa famille et ses descendans. Il est naturel de présumer que le second père du genre humain imprima fortement dans l'esprit de ses enfans l'idée des attributs de Dieu, et de la nécessité de se conduire conformément aux lois de la morale. L'avantage qu'il eut d'avoir échappé à la destruction générale, doit lui avoir fait contempler la bonté et l'indulgence de Dieu avec plaisir, ainsi qu'avec reconnaissance; et sa puissance, sa sagesse, et sa justice, avec respect, admiration, et crainte de l'offenser. Il doit avoir dit à sa famille que le monde antédiluvien était incorrigiblement corrompu, et qu'il fut détruit, non-seulement pour ses crimes, mais encore, afin que son sort servit d'exemple à la postérité. Ainsi, ses disciples ont reçu de lui des préceptes religieux et moraux, et chacun d'eux a transmis la même instruction à ses enfans et à ses descendans. La tradition fut, sans doute, la source d'où les nations et les sages de l'antiquité tirèrent les idées raisonnables de l'existence et des attributs de Dieu. Il paraît, par Eusèbe', que plusieurs peuples anciens avaient à peu près les mêmes idées de l'Être--Suprême; et cela est vraisemblable, puisque tous avaient la même origine, et que les traditions de Noé doivent s'être conservées sans aucune corruption, chez toutes les nations, pendant quelque tems après le déluge. » « Noé, dit Thomassin, fut comme le père du monde nouveau et de tout le genre humain échappé du déluge; cette qualité demandait que Dieu lui fît part de ces grands avantages et de ces trésors de sagesse dont il avait comblé Adam dans la première création. Noé eut cette excellence par-dessus Adam même, qu'il fut inviolablement attaché à la loi et aux commandemens de Dieu. Sa vie fut même un peu plus longue que celle d'Adam; car ayant vécu 600 ans avant le déluge, il • Prop. evang., liv. 1. —Confirmer par de nombreuses citations une indication si vague serait un hors-d'œuvre qui nous jetterait dans d'interminables longueurs. D'ailleurs, viendra un peu plus tard l'occasion d'emprunter à ce fer liv. d'Eusèbe des textes précis. (Note du traducteur.) Méthode d'étudier et d'enseigner chrétiennement la philosophie, 1e partie, l. 1, ch. 3, p. 29, 30, 31. Paris, 1685. In-8°. |