Page images
PDF
EPUB

surtout de la part des gens de lettres. En effet on y trouve beaucoup moins de ce style enflé et tendu qu'on lui a reproché dans ses autres ouvrages, et qu'un homme de goût a qualifié assez plaisamment d'hydropique. Cet Essai n'est pas seulement une poétique des éloges ; c'est l'histoire de la littérature et de l'éloquence appliquées à ce genre. La manière dont l'auteur caractérise les anciens et surtout les Grecs, est remplie de finesse et de goût. Rien de plus facile et de plus gracieux que l'article sur Xénophon ; de plus noble et de plus sublime que celui de Platon; de plus énergique et de plus concis que celui de Tacite. Les morceaux les plus importans de la seconde partie sont les articles de Henri IV, de Louis XIII, de Bossuet (1), de Louis XIV et de Fontenelle. Nous ajouterons cependant qu'on re

nie, s'échappe quelquefois. Virgile, plus retenu, plus timide, réfléchit sur tout et pèse tout; il polit et travaille jusqu'au moindre détail..... Tous deux, quoi qu'il en soit, sont et seront dans tous les temps les délices des gens de goût. » Il est inutile de dire que l'auteur de ce parallèle est traducteur de Théocrite, et qu'il n'est pas surprenant que selon la coutume, il présente son héros sous l'aspect le plus favorable.

(1) Il faut cependant excepter de cet article le passage où Tho mas ose avancer qu'on n'a point dit assez (avant lui) combien Bossuet est quelquefois LONG, FROID et VIDE D'IDÉES. Nous livrons cette étrange assertion à la réflexion, nous oserions presque dire, à l'indignation du lecteur.

[ocr errors]

Puisqu'il est ici question de Bossuet, nous réparerons une omission qui a eu lieu dans l'article que nous lui avons consacré, tom. 1, pag. 172. Nous aurions dû dire que ce grand homme avoit une prédilection particulière pour SAINT AUGUSTIN. Il lui donnoit la

proche à Thomas de n'avoir point parlé de l'éloge que l'abbé Galiani a fait de Benoit XIV; c'est un modèle pour le fond et pour le style. Il a également oublié le panégyrique de Frédéric II, roi de Prusse, par M. Sulzer, et l'éloge que ce même Frédéric a fait d'un prince de sa maison. Il a aussi passé sous silence quelques éloges de M. Hirzel, l'auteur du Socrate rustique. Quoique moins connus, ils méritoient d'être cités, parce qu'on y trouve souvent la grâce de Xénophon réunie à la simplicité des mœurs. helvétiques, ce qui leur donne un caractère original. Pour les autres ouvrages de Thomas, nous renvoyons à notre tom. 1, pag. 362.

ALB. TIBULLE ( n. 695 de R., 59 av. J.-C. m. 735 de R., 19 av. J.-C.). Il reste de cet aimable poëte trente-cinq élégies, et un panégyrique adressé

préférence sur tous les autres Pères. Il le lisoit continuellement ; il en avoit fait de longs extraits ; il ne faisoit aucun voyage qu'il ne l'eût avec lui. Quand il avoit un sermon à faire, il prenoit SAINT AUGUSTIN; quand il avoit une erreur à combattre, un point de foi à établir, il lisoit SAINT AUGUSTIN. Il s'étoit fait une si grande habitude de son style, de ses principes et de ses propres paroles, qu'il a rétabli une lacune de huit ligues dans le sermon 299 de l'édition des Bénédictins ( Parisiis, 1679-1700, 11 tom. en 8 vol. in-fol.); ces savans religieux ont reconnu que cette lacune avoit été bien rétablie, et ils en ont fait honneur à Bossuet. Enfin nous diróns que notre illustre orateur, pénétré si profondément de l'esprit de SAINT AUGUSTIN, s'est toujours conformé à sa méthode, soit pour conférer avec les hérétiques et réfuter les nouvelles erreurs, soit pour saisir les grands principes de la Religion, catéchiser les pcuples et instruire les rois.

à Messala sous lequel il fit une campagne en Aqui, taine l'an 724 de R. On divise ordinairement ses élégies en quatre livres, mais on a des doutes sur l'authenticité des deux derniers livres ; quant aux deux premiers, et au panégyrique qui commence le quatrième et les deux élégies qui le terminent, ils sont indubitablement de lui. On regarde la première élégie du premier livre comme la meilleure de Ti, bulle. Au reste dans tout ce qu'il a écrit, il est tendre, naturel, passionné, délicat, noble sans faste, simple sans bassesse, élégant sans artifice; enfin, comme écrivain, il est supérieur à ses rivaux ; sou goût est pur, sa composition irréprochable. Il a un charme d'expression qu'aucune traduction ne peut rendre. C'est le poëte du sentiment. Son style a une harmonie délicieuse qui porte au fond de l'ame les impressions les plus douces. Tibulle, Virgile et Horace passent pour les modèles de la perfection dans l'art d'écrire.

, que

TITE-LIVE (n. 695 de Rome, 59 avant J.-C. m. 772 de Rome, 19 de J.-C. ) Cet historien a composé une Histoire romaine fort étendue l'on regarde à juste titre comme l'un des plus beaux monumens historiques, mais qui malheureusement a été très maltraitée par la faux du temps; car de cent quarante-deux livres qu'elle contenoit, à peine nous en reste-t-il trente-cinq ou trente-six, dont plusieurs encore ont des lacunes. (V. le détail des débris de cette Histoire, échappés au naufrage, danş

notre tom. 1.er, pag. 123.) Nous nous contenterons de dire ici que les morceaux les plus beaux de TiteLive sont: le combat des Horaces et des Curiaces, que l'on a toujours distingué particulièrement liv. 1; la ruine d'Albe, liv. 1; le combat de T. Manlius et d'un Gaulois, ainsi que celui de Valerius (Corvus), également avec un Gaulois, liv. vi; le caractère de Papirius Cursor, liv. Ix; le caractère d'Annibal, liv. xx1; le passage des Alpes, et ensuite celui de l'Appennin, par le mé-, me Annibal, liv. xx1; la bataille de Cannes liv. xxII; les délices de Capoue, liv. xx111; xxiii le combat de Badius et de Crispinus, liv. xxv; la peste de Syracuse, liv. xxv; le caractère de Scipion l'Africain, liv. xxvi; la mort d'Annibal, liv. xxxix; la prise et la mort de Philopomen, liv. xxxix; le caractère de M. Porcius Caton, liv. xxxix, etc. etc. etc. Si nous ne parlons point des beaux discours disséminés dans l'Histoire de. Tite-Live, c'est qu'ils ont été réunis dans un ouvra~ ge connu sous le nom de Conciones. On en a fait de même pour les plus beaux traits de l'Histoire romaine, dans un volume publié sous le titre de, Narrationes excerptæ. Nous renvoyons à ces deux ouvrages.

XXXIX

LUC CLAPIERS DE VAUVENARGUES (n. 1715: m. 1747), l'un des écrivains moraux les plus distingués du XVIIIe siècle, a laissé des ouvrages. qui portent l'empreinte de la plus belle ame et d'un

grand caractère. Quoiqu'il n'ait presque point fait d'études, qu'il ait peu vécu (32 ans, dont 9 au service), et qu'il ait toujours été souffrant, on voit qu'il avoit contracté une longue habitude de méditer, et il écrivoit fort bien. Son goût et ses principes étoient purs. Les ouvrages qu'il a composés sont : une Introduction à la connoissance de l'esprit humain, en trois livres; des Réflexions sur divers sujets ; des Réflexions critiques sur quelques poëtes et sur quelques orateurs ; des Caractères; des Réflexions et. Maximes; une Imitation de Pascal; des Lettres à Voltaire, etc. Parmi ces différens ouvrages on a distingué les Maximes, dont une surtout (la 127.e): « Les grandes pensées viennent du cœur », a été beaucoup citée. Il y en a cependant dans le grand nombre (867) quelques-unes qui présentent un sens louche. Le chapitre sur le bien et le mal moral, qui commence le troisième livre de l'Introduction à la connoissance de l'esprit humain, est très bon. La Méditation sur la foi, et la Prière qui la termine, sont fort belles. Ses Réflexions sur quelques poëtes et quelques orateurs offrent de très beaux morceaux, dont nous avons quelquefois profité dans le cours de notre ouvrage.

Nous devons ici réparer l'omission d'un article sur les livres que préféroit Vauvenargues; il devoit se trouver dans notre premier volume, pag. 215, entre SAINT-HYACINTHE et D'AGUESSEAU. VAUVENARGUES, comme toutes les personnes habituées aux profondes méditations, ne lisoit qu'un très petit

« PreviousContinue »