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fin une tirade que l'on pourroit citer pour fixer la dernière borne du talent de Saurin. Il y déploie l'éloquence dominante de Saint Jean Chrysostôme.

L. A. SÉNÈQUE LE PHILOSOPHE (n. vers 750 de R., 4 ans av. J.C.-m. 818 de R., 65 de J.-C. ). II a laissé beaucoup d'ouvrages de philosophie morale, et quelques autres ; on remarque dans tous de l'esprit et du génie, mais le style en est trop affecté et bien éloigné du goût qui régnoit chez les Latins du temps d'Auguste; cependant il se fait lire avec plaisir et intérêt. On distingue parmi ses productions la Consolation à Livie. C'est le morceau qui inspire le plus d'estime pour le caractère moral de Sénèque ; car il est plein de sentences vraies et profondes, et inspire cette ferme constance qu'une ame innocente doit opposer aux coups du sort. Il devroit être le bréviaire des malheureux. Une autre Consolation à Mar

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cia sur la perte de son fils, est un morceau touchant et éloquent. Le traité des Bienfaits, en sept livres est un fort bel ouvrage qui roule sur la bienfaisance sur la reconnoissance et sur l'ingratitude. Les cent vingt-quatre Lettres que Sénèque adresse à Lucilius junior, sont des traités de morale sur divers sujets. Il y a de très bonnes maximes. Quelques-uns des morceaux les plus intéressans sont : De l'état des premiers humains, ép. 90; Du faux et du vrai Philosophe, ép. 5; S'affranchir du joug des passions, ép. 80; De l'ambition et de la fausse grandeur, ép. ́94; Des excès du vin, ép. 83; De l'intempérance,

ép. 95, etc. etc. etc. Les Questions naturelles de Sénèque sont en sept livres. Le premier traite du feu et des météores célestes; on y remarque un morceau sur l'invention des miroirs. Le second est relatif aux éclairs, au tonnerre, à leurs causes et à leurs effets. Le troisième traite de l'eau, et par digression, du luxe des Romains dans la recherche des poissons de grand prix, puis des inondations. Le quatrième regarde le Nil, ensuite la gréle, la neige et la glace, et par digression, le luxe de la table. Le cinquième est consacré au vent; on y trouve un assez bon passage sur l'abus de la navigation. Le sixième a rapport aux tremblemens de terre et aux sources du Nil; il y a un passage sur la mort, qui est bien fait. Enfin le septième concerne les comètes. Il est inutile de dire que ces Questions naturelles offrent, au milieu de beaucoup de choses curieuses, des erreurs en physique et en géologie. On a encore de Sénèque un traité de la Providence, un de la Clémence, un de la Briéveté de la vie, etc. etc.

Quant à SÉNÈQUE LE TRAGIQUE, est-il le même que le philosophe? C'est ce qu'on ignore. Mais, dans les dix pièces qui nous restent sous ce nom de tout le théâtre tragique latin, on assigne le premier rang à Hippolyte; ensuite on remarque les Troyennes; Médée, et Thyeste. Les six autres sont : Hercule furieux ; les Phéniciennes ou la Thébaïde; Agamemnon ; OEdipe; Hercule au mont ŒEta, et Octavie; mais cette dernière pièce ne peut être de Sénèque. (Voy. sur ces tragédies, notre tom. 1, pag, 131-132.).

C. SILIUS ITALICUS (n. 25 de J.-C.-m. 100), est connu par un poëme intitulé Punica, dans lequel il célèbre, en dix-sept chants plus historiques qu'héroïques, la seconde guerre punique. Il y suit scrupuleusement l'ordre et le détail des faits depuis le siège de Sagonte jusqu'à la défaite d'Annibal et la soumission de Carthage. Il a puisé le fond de son sujet dans Tite-Live et Polybe, et les ornemens poétiques dans Virgile, ainsi que dans Lucrèce, Horace, Hésiode et Homère; mais comme il a plus le talent d'emprunter ces ornemens que de se les approprier, cela donne à sa diction une inégalité désagréable, qui n'est pas rachetée par l'apparence d'érudition et la pompe affectée qu'on remarque dans son poëme et qui au contraire y répand de la froideur; cependant si les caractères de ses personnages, conformes à la vérité historique, n'ont pas toute l'élévation que la poésie pourroit leur donner, on peut dire que les sentimens que l'auteur leur fait exprimer sont nobles et grands; et parmi les descriptions dont son poëme fourmille, celles des batailles sont surtout admirables.

On prétend que Silius Italicus fut très bon orateur, et qu'il s'étoit proposé pour modèle Cicéron dans l'éloquence, comme Virgile dans la poésie. Étoit-ce pour se familiariser davantage avec ces deux grands génies, qu'il avoit acheté deux campagnes qui leur avoient appartenu, celle de Cicéron à Tusculanum, et celle de Virgile, près de Naples où ce poëte étoit enterré ? C'est dommage que leurs pro

priétés aient été beaucoup plus faciles à acquérir que leurs talens; nous aurions de plus une bonne épopée, et peut-être quelques harangues célèbres, tandis qu'il faut nous en tenir au chétif Punica. Pline le Jeune a une lettre fort intéressante sur Silius Italicus. Voy. liv. 11, épít. 7 à Caninius; il lui annonce la mort de ce poëte.

SOPHOCLE (n. 498 av. J.-C.-m. 406), avoit composé plus de cent tragédies; il ne nous en reste que sept, parmi lesquelles celle d'OEdipe Roi passe non seulement pour la plus belle de Sophocle, mais pour la meilleure de toutes celles qui nous restent de l'antiquité, si l'on considère le choix et la disposition du sujet. Les autres pièces de Sophocle sont : Ajax, Electre, Antigone, les Trachiniennes, Philoctète, et OEdipe à Colone.

P.-P. STACE (n. 61 de J.-C.-m. 96), a laissé des Sylves ou mélanges, en cinq livres, qui contiennent trente-deux petits poëmes; une épopée, la Thébaïde, en douze livres, dont le sujet est la querelle d'Étéocle et Polynice, terminée par la mort des deux frères ; et le commencement d'une Achilléide, dont Achille eût été le héros, et dont le premier chant seul a été terminé, le second étant resté imparfait par la mort de l'auteur. La Thébaïde, principal ouvrage de Stace, a le défaut de tous les poëmes latins postérieurs à l'Énéide, qui est d'être plus historique que poétique, et plus remplie d'éru

dition que de développemens épiques. Le poëte ne manque pas d'imagination, d'idées hardies, de sentimens élevés ; mais il ignore l'art d'Homère, et même de Virgile son modèle, qui est de donner à chacun de ses héros un caractère individuel. Sa diction n'est pas simple et naturelle; il prend l'exagération pour la grandeur, et les subtilités pour de l'esprit. Malgré ces défauts, on ne peut s'empêcher de distinguer dans la Thébaïde le onzième chant; le combat des deux frères y est le plus bel endroit du poëme; et dans ce qui précède et ce qui suit ce combat, on trouve beaucoup de force et de pathétique. Stace s'est bien rendu justice, si la sincérité plus que la modestie lui a fait dire à la fin du poëme, en par lant à sa Muse :

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Nec tu divinam AEneida tenta,

Sed longè sequere, et vestigia semper adora.

C. SUÉTONE T. (n. 823 de R., 70 de J.-C. — m. 883 de R., 130 de J.-C. ). L'histoire des Douze Césars que nous a donnée cet écrivain, est plutôt un recueil d'anecdotes sur ces princes, qu'une histoire suivie de leurs actions politiques et militaires. Il n'y a aucun ordre chronologique, mais une division de matières qui tient au plan que s'est formé l'auteur. A chaque empereur, il parle successivement de sa naissance, de sa jeunesse, de ses exploits, de ses ordonnances, de sa manière de vivre, de vêtir, de se nourrir, de ses amusemens, de ses occupations, de sa figure, de son épouse, et de sa

se

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