citoyens, et qui, nommés immédiatement par la couronne et destituables à sa volonté, sont dans sa plus étroite dépendance, et lui donnent une influence extrême. Voilà, disait l'auteur, la conséquence inévitable des fonds de crédit, et des taxes perpétuelles établies pour les former. Il en vient aux fonds de la liste civile, ou revenu direct du roi. Cette somme annuelle de plus de sept millions de livres sterling (plus de cent cinquante-sept millions de notre monnaie), qui fournit aux intérêts des créanciers de l'Etat et au fonds d'amortissement, est d'abord déposée au trésor royal, et de là distribuée dans les banques. Quelle foule de conséquences importantes, et, pour trancher le mot, funestes à la liberté, peuvent résulter de cet arrangement, lorsque le souverain osera prévariquer ! L'auteur trouve encore un acte très - imprudent d'une confiance excessive, dans cette armée disciplinée, payée immédiatement par le roi, commandée par lui, laquelle ne doit, il est vrai, rester qu'une année sur pied et de l'aveu du parlement, mais qui, une fois levée, est entièrement à la disposition du monarque. Certes, dit-il, une telle prérogative l'emporte infiniment sur toutes celles que le roi d'Angleterre a perdues car un gouvernement, quelque absolu qu'il puisse être, s'il n'avait point à ses ordres une armée, serait beaucoup plus loin de l'oppression que l'adininistration la plus limitée, qui, soudoyant continuellement des troupes mercenaires, peut porter, au moment où elle voudra, des coups mortels à la liberté d'un peuple désarmé, sans méfiance, et d'autant plus dénué de l'esprit militaire, ce ressort précieux et né cessaire à toute nation qui veut se maintenir libre, que l'esprit légionnaire s'y étendra davantage. Notre auteur conclut enfin que les particuliers ont bien, en Angleterre, l'exercice de la liberté, parce que les lois, en général, et surtout les lois criminelles et les formes des jugemens (qui cependant s'altèrent visiblement) y sont admirables; mais que l'Angleterre est fort loin d'avoir sa liberté politique, comme elle a sa liberté civile; et qu'elle ne l'aura jamais, tant que sa représentation sera imparfaite, et les principes de sa politique si vagues, si exagérés, si arbitraires et si variables. Le savant et judicieux Blackstone soutient que l'usage de l'examen par pairs ou par jurés, et le maintien de la loi d'habeas corpus, suffisent pour garantir à jamais la liberté d'une nation. J'en doute, moi, dit l'anonyme, qui crois que toutes les parties de l'administration se tiennent par une chaîne indissoluble, et que la liberté politique et civile sont les deux parties inséparables d'un même tout, du moins si l'on considère la durée, cet objet principal de toute bonne législation. Mais dans la supposition même de Blackstone, la liberté britannique est très-menacée ou plutôt entamée; car les Anglais abandonnent, petit à petit, l'examen par jurés, et l'on ne voit pas qu'ils aient une sûreté suffisante du maintien de la loi d'habeas corpus, suspendue au moment où l'auteur écrivait, puisque leurs représentans ne sont ni assez dépendans de leurs constituans, ni assez indépendans du souverain, qui, averti par des exemples terribles de l'humeur peu endurante de ses sujets, généreux, mais fougueux et passionnés, respecte encore en apparence leur constitution; mais qui acquiert tout le pouvoir nécessaire pour l'enfreindre, et lui portera, s'il l'attaque jamais à force ouverte, des coups d'autant plus sûrs, que, sachant quels risques il court, il prendra mieux ses précautions. (Nous désirons que le fragment n° III, et l'analyse du n° IV donnent quelques regrets aux lecteurs de ce que ces morceaux sont mutilés.) FIN DU SEPTIÈME VOLUME. VII. 32 CHAPITRE PREMIER. Jussions arbitraires formellement réprouvées par nos lois, depuis le commencement de la monarchie jusqu'à nos jours. Cruauté des Valois et nommément de Louis XI envers les prisonniers d'État. A quelle époque les lettres de cachet se sont multipliées. Premier et uni- CHAP. II. Principes du droit naturel. Formation des sociétés. Conditions indispensables de toute association humaine. Le respect des propriétés, ou la justice fondée sur la sensibilité physique, l'amour de soi et la raison, impérieusement exigée par notre nature, indépendamment de tout système religieux, est le premier titre qui lie les hommes, et le seul CHAP. III. Les principes précédens sont indépendans de tout système religieux, et ce serait un grand bien que cette vérité fût générale- ment admise. Despotisme sacerdotal, cause nécessaire du despotisme CHAP. IV. Collusion des deux autorités ecclésiastique et civile. La jus- tice, source commune de tous les rapports humains, est le fondement des droits réciproques des peuples et des souverains, quelle que soit l'origine des CHAP. V. Origine du droit de punir. Distribution du pouvoir judiciaire. L'exercice de la justice est absolument incompatible avec les ordres et les emprisonnemens arbitraires. Ils sont plus redoutables à la liberté politique, plus cruels pour les individus qui les endurent, que toute autre vexation et que les violences sanguinaires même. CHAP. VI. Les emprisonnemens arbitraires et indéfinis, loin d'être néces- بو CHAP. VII. Preuves de fait. L'autorité limitée a toujours été la plus stable. Le gouvernement ne peut craindre en France que ses propres excès. Le despotisme a toujours produit les révolutions; et la réunion des trois pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire, a toujours produit le des- CHAP. VIII. Partout où la monarchie est illimitée, le hasard seul peut préserver de la tyrannie. Réfatation des principes des économistes à cet égard. Le gouvernement ne cesse d'être responsable des inconvéniens particuliers que lorsqu'il n'intervertit pas le cours des lois. S'il prétend tout faire par lui-même, le despotisme et toutes ses suites sont inévi- CHAP. IX. Refutation d'un principe de M. de Montesquieu, qui croit qu'en certain cas il faut suspendre la liberté. Iniquité de l'ostracisme. Censure. Bill d'atteinder. Loi d'habeas corpus. CHAP. X. Police des grandes villes. Exemple de la Hollande et de l'An- gleterre. Définition du mot nécessité dans son acception politique. 184 CHAP. XI. La prérogative des emprisonnemens arbitraires et indéfinis considérée relativement aux particuliers. Est-il des crimes qui ne doi- vent point être révélés? Composition des prisons d'État. Effets qui doi- vent résulter de ce séjour, où l'oppression égale tout et tous, soit que les prisonniers se communiquent, soit qu'ils ne se communiquent pas. Maisons de force. Prisons d'État considérées relativement à la popu- CHAP. XII. Point de vue sur notre histoire, depuis Philippe le Bel jus- CHAP. XIII. Les lettres de cachet menacent plus encore les grands, c'est-à dire ceux qui les invoquent, que les petits, et peuvent dé- pouille les uns et les autres de tout ce qu'ils possèdent. L'esprit de corps et la jalousie des différens ordres de l'État soutiennent le des- potisme. Les formes légales sont une sauve-garde nécessaire à la li- berté et à l'innocence. Le bien même qu'on peut faire par des voies illégales est funeste à la société. CHAP. XIV. Si les lettres de cachet confondent l'innocent et le cou- pable, c'est une raison suffisante pour abolir à jamais cette méthode; car toute méthode qui tend à sacrifier un innocent, fût-il seul contre tous, à un prétendu intérêt public, est tyrannique. Les lettres de ca- chet ne sauvent point la honte aux familles en soustrayant les cou- pables à la société et aux tribunaux. Quand, dans nos préjugés, l'in- famie ne serait pas personnelle, il ne tiendrait qu'au souverain de la SECONDE PARTIE. |