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sualité. L'homme seul, en effet, a compris la famille où s'élaborent et se pratiquent ces principes de haute morale qui font un devoir de l'abnégation, et métamorphosent ainsi en vertus tous les penchans de nos ames......... le besoin d'aimer Dieu, enfin, besoin sublime qui, dans les ames d'élite, absorbe tous les autres, remplit dans toutes ses phases la chaste vie des saints, et constitue dans l'éternité le bonheur des élus. Mais qu'on ne s'y trompe pas, cet amour dont je parle n'a plus rien qui se rattache à la vie des organes, et les uliras du matérialisme chercheraient vainement à découvrir quelque trace d'instigation sensuelle dans les séraphiques extases de sainte Thérèse ou dans la brûlante ferveur du célèbre évêque d'Hippone. ».

L'article action, par M. l'abbé Receveur, professeur de dogme à la Sorbonne et rédacteur en chef de l'Encyclopédie du XIXe siècle, mérite aussi, sous tous les rapports, une mention particulière, d'autant que l'ordre d'idées dont il se compose semblent appartenir, par voie d'analogie, à celles des fragmens qui viennent d'être reproduits. Après avoir établi et prouvé la liberté morale de l'homme et déterminé les circonstances générales qui rendent une action bonne ou mauvaise, M. Receveur poursuit en ces termes : « L'homme ayant été créé pour une fin comme tout ce qui existe, et jouissant de la liberté d'agir conformément à sa destination, il s'ensuit que les actions humaines doivent naturellement se rapporter à une fin, et que, pour être dans l'ordre, elles doivent être constamment rapportées à cette fin véritable. Or, comme Dieu est le principe de tout, que c'est de lui que tout dépend et à lui que tout appartient, il suit de là aussi qu'il doit être la fin de tout, que tout doit remonter vers lui, et que toutes nos actions doivent lui être rapportées comme à leur fin dernière; on doit conclure de là qu'il n'y a point d'actions indifférentes, c'est-à-dire qui ne soient moralement ni bonnes ni mauvaises.

» Parmi les actions bonnes et louables, il en est qui sont appelées naturelles, parce qu'elles tiennent uniquement à des motifs inspirés par la nature et saisissables à la raison; il en est d'autres qui sont surnaturelles, parce que leur motif est puisé dans la révélation, et qu'elles ont leur principe dans la grâce. Un païen, qui donne l'aumône à un pauvre par compassion fait une œuvre naturellement bonne ; il n'est pas besoin de la révélation pour sentir qu'il est louable de se

courir son semblable quand ils souffrent ; la nature seule nous inspire de la pitié pour eux, et la grâce n'est pas nécessaire pour obéir à cette inclination. Un chrétien qui porțe des secours à un malheureux, fût-il son ennemi, pour obtenir le pardon de ses fautes ou la récompense que Dieu lui promet dans l'autre vie, fait une bonne œuvre surnaturelle; car c'est la révélation qui lui suggère ces motifs, et dans cette vue, il ne peut agir, sans le secours de la grâce; les actions surnaturelles sont les seules qui soient méritoires dans l'ordre du salut. >>

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Nous terminerons nos extraits par une citation de l'article témoignage de M. l'abbé Flottes, chanoine et vicaire général du diocèse de Montpellier, à qui l'Encyclopédie du XIX siècle doit plusieurs articles d'un talent très distingué sous le rapport du style et sous celui de l'élévation des pensées. M. Flottes définit le témoignage, dans son acception générale, la déclaration d'une ou de plusieurs personnes qui affirment qu'une chose est, et la foi (fait psycologique) l'adhésion au témoignage. Un célèbre théologien, Estius, d'après saint Paul, dit que c'est la preuve des choses qu'on ne voit pas, et Fénelon, que c'est l'Évangile en action, l'incarnation de la parole divine. Le sens de toutes ces formules est également juste. L'auteur de l'article témoignage développe la sienne avec beaucoup de netteté : « La foi, dit-il, est déterminée par la persuasion que le témoignage est exempt d'erreur; cette persuasion prend sa source dans les lumières de l'esprit et dans les sentimens du cœur. La foi est spontanée lorsque l'esprit ne se rend pas compte des raisons qui déterminent son adhésion; elle est réflé– chie dans le cas contraire...................... La foi n'est pas seulement un supplément nécessaire aux sens et à la conscience pour tous les faits dont nous ne sommes ni les témoins ni les sujets; elle est encore souvent notre guide lors même qu'il est question des faits qui auraient pu être soumis au témoignage de nos sens: enlevez la foi ou l'adhésion au témoignage, l'histoire n'a point d'autorité pour nous, et le lien entre le passé et le présent est brisé, nos connaissances en physique sont enfermées dans le cercle étroit de notre expérience personnelle, l'éducation est impossible, les nœuds de la famille sont rompus, les fondemens de la société sont renversés.......... mais la Providence a voulu aussi nous épargner les anxiétés de l'incertitude quand il s'agit

de notre bonheur, de notre conservation et qu'il est urgent de prendre un parti. Elle nous a constitués de telle sorte que la foi du cœur, que la foi spontanée nous deviennent alors plus faciles et sont aussi fermes que sourdes aux scrupules de la raison; elles ne connaissent ni le doute ni la crainte de l'erreur...... >>

A ces citations qui suffisent pour faire apprécier à nos lecteurs l'esprit de l'Encyclopédie du XIXe siècle, ou pourrait ajouter une multitude d'articles qui font honneur tout à la fois aux hommes éminens qui les ont écrits, et à l'administration intelligente qui a su les réunir. Mais l'espace nous manque pour rendre justice à tous, et nous ne pouvons que mentionner quelques-uns des travaux que nous considérons comme des traités complets, originaux et dignes de l'attention des hommes éclairés. Tels sont les articles: Ame, par M. l'abbé Receveur; Anglicanisme et Arianisme, par M. l'abbé Blanc; Art, Barbares, Tiers-État, par M. Buchez; Angleterre, Allemagne et Voltaire, par M. Philarète Chasles; Bible, Talmud, par M. Drach; Voyages, par M. F. Denis; Volcans, par M. Dufresnoy; Végétation, par M. Dunal; Aubigné, Balzac, par M. Géruzès; Académie, Alcoran, par M. le baron Guiraud; Agriculture, Agronomie, par M. Huerne de Pommeuse et baron de Morogue; Amour, Atheisme, Amitié, par M. Laurentie; Archéolo ie, Beau, par M. Lenormant; Algèbre, par M. Liouville; Aliénation, par M. le docteur Esquirol; Terrain, par M. C. Prévost; Vapeur (bateau et mamachines à), par MM. Thomas et Laurens; et d'autres travaux de MM. de Feletz, Charles Nodier, Briffault, Artaud, Champollion et de M. Louis Dubeux.

Nous bornerons donc là nos remarques sur une œuvre qui répond à l'un des besoins les plus réels de notre époque, celui d'une bonne encyclopédie. Elle se recommande à la fois par sa valeur propre, qui est incontestable, et par sa valeur comparative que nous n'avons pas eu beaucoup de peine à faire ressortir. C'est donc en parfaite connaissance de cause que nous la signalons, comme digne des sympathies des amis de la science et des amis de la religion.

Sous ce dernier rapport aucun ouvrage ne saurait offrir de garanties plus complètes; nous nous rappelons une lettre publiée par la Gazette de France, par laquelle M. l'abbé Receveur faisai connaître qu'ayant

accepté, sur l'invitation de feu Mgr l'archevêque de Paris, les fonctions de rédacteur en chef de l'Encyclopédie du XIXe siècle, son concours lui était acquis jusqu'à la fin de la publication et que jamais il n'avait été publiée, ni ne serait publiée une seule page sans son visa.

Nous avons lu une autre lettre, insérée dans l'Ami de la religion, où M. le curé de Notre-Dame, dont l'excellent article Bossuet figure parmi ceux que nous avons omis de citer, recommandait l'Encyclopédie du XIX® siècle à tous les catholiques, comme un ouvrage très utile pour combattre l'erreur et pour faire triompher la vérité.

De T.

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ÉCRITURE. L'Écriture est à la parole, ce que la mémoire est à la pensée. Sans la mémoire l'homme n'existerait que l'instant inappréciable qui forme son présent. Tout son passé serait perdu sa raison même, qui n'est presque qu'une suite de déductions, s'évanouirait; aussi le même créateur qui lui donna la pensée lui donna la mémoire. Or, l'Écriture est le complément de la parole et de la mémoire. Sans l'écriture, sans la connaissance du passé, sans cette parole incarnée, corporisée, prolongée, la grande société humaine et universelle serait impossible. L'homme ne formerait qu'une infinité de sociétés restreintes, isolées, inconnues les unes aux autres. La société n'aurait valu en durée que la mémoire d'un homme ou de quelques hommes : dès-lors il devenait impossible à l'homme de se souvenir de son origine, de connaître ses filiations, de conserver ses traditions, de profiter des pensées, des sciences, des découvertes des autres hommes. Dieu donc qui a créé l'homme en société et pour la société, lui a donné non seulement la pensée, la mémoire et la parole, mais encore a dû lui donner l'Écriture. Il importe peu que l'on ne sache pas avec certitude quelle fut cette écriture, comme l'on ne sait pas quelle fut la langue qui la première lui fut donnée; ce qui est certain, c'est que l'homme connut dès le commencement tout ce qui était nécessaire à son état de société, et par conséquent le moyen de fixer par des signes les sons fugitifs de la parole. L'esprit de l'homme a pu modifier, perfectionner ces moyens, mais comme ils font partie essentielle

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