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régulier. C'est ainsi qu'Eusèbe de Césarée, au chap. 17 du livre II de son histoire ecclésiastique, rappelant l'éloge que le savant juif Philon faisait de l'Église d'Alexandrie à l'époque de saint Marc, ajoute entre autres choses. Et un peu plus loin au sujet des psaumes nouveaux qu'ils composent, il ajoute : « Et ainsi non seulement ils comprennent « les hymnes subtiles des anciens, mais ils en composent de nouvelles « à la louange de Dieu, les modulant sur tous les mètres et sur tous <«<les tons, avec une harmonie pure et suave. »

>> Sans doute il est permis de donner le nom d'hymnes à tous les psaumes composés en hébreu suivant certain rhythme et certaine mesure et avec une douceur qui tient du miel. Ce nom rentre même dans la définition de l'hymne telle que nous l'avons donnée dans notre première préface". Mais comme les psaumes, en passant de l'hébreu dans une autre langue, ont perdu leur rhythme et leur mesure, c'est avec raison que l'apôtre, écrivant aux Éphésiens, qui sont des grecs, a séparé des psaumes les hymnes et les cantiques.

* C'est au sujet de ces hymnes, chères filles en Jésus-Christ, que vous avez souvent sollicité notre faible génie par vos prières, en ajoutant les causes qui nécessitaient votre demande, et nous avec la grâce de Dieu, nous nous sommes rendus en partie à cette demande. En effet, dans le livre précédent, nous avons renfermé des hymnes quotidiennes de féries qui puissent suffire à toute la semaine.

>> Nous les avons composées, pour que vous le sachiez, de telle sorte qu'il y a double chant et double rhythme, une mélodie commune pour tous les nocturnes et une autre pour les chants diurnes.

» Nous n'avons pas omis non plus l'hymne de grâces après le repas, suivant qu'il est écrit dans l'évangile : « Et ils sortirent après l'hymne » récitée. »

>> Et quant aux hymnes qui précèdent, en les composant nous avons été dirigés par cette pensée que les nocturnes doivent contenir les œuvres de leurs féries, et que les diurnes doivent contenir l'exposition allégorique ou morale de ces œuvres; si bien que l'obscurité de l'histoire soit réservée pour la nuit, et la lumière de l'exposition pour le jour.

>> Il vous reste maintenant à m'aider de vos prières, pour que je puisse vous transmettre le petit présent que vous désirez.

III.

Superioribus duobus libellis quotidianos feriarum hymnos et solemnitatum divinarum proprios digessimus : nunc vero superest ad cælestis gloriam regis et communem fidelium exhortationem, ipsam quoque superni curiam palatii debitis hymnorum, prout possumus, efferre præconiis. In quo quidem opere ipsi me precipue adjuvent meritis quorum gloriosæ memoriæ qualiumcumque laudum munuscula cupio persolvere, juxta quod scriptum est: « Memoria justi cum laude',» et iterum: « Laudemus viros gloriosos etc'. » Vos quoque obsecro, sorores carissimæ Christoque dicatæ, quarum maxime precibus hoc opus agressus sum vestrarum adjungite devotionem orationum illius memores beatissimi legislatoris qui plus orando quam populus potuit dimicando 3. Et ut caritatem vestram in orationum copia largam inveniam, pensate diligenter quam prodigam vestra petitio nostram habuit facultatem. Dum enim divinæ gratiæ laudes pro nostri ingenioli prosequi studeremus, quid de ornatu deest eloquentiæ recompensavimus hymnorum multitudine, singulis videlicet singularum solemnitatum nocturnis proprior componentes hymnos cùm unus solummodo hucusque hymnus in festis quoque sicut in feriis ad nocturnos precineretur. Quatuor itaque hymnos singulis festivitatibus ea ratione decrevimus ut in uno quoque trium nocturnorum prius decantetur hymnus et laudibus insuper matutinis non desit suus 7. Ex quibus rursus quatuor instituimus, ut duo in vigilia pro uno conjungantur hymno et duo reliqui similiter ad vesperas ipso die solemni recitentur, aut ita bini et bini in singulis vesperis dividantur ut cum duobus prioribus psalmis unus et cum duobus reliquis alius decantetur. De cruce autem memini quinque conscripti sunt hymni, quorum primus singulis preponatur horis invitans diaconem crucem de altari tollere et in medio chori afferre atque ibidem eam quasi adorandam ac salutandam statuere ut in ejus quoque presentia tota per singulas horas peragatur solemnitas. (Suiv. les hym, de la 3o catég.)

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1 Proverb, x, 7. La Vulgate et presque tous les anciens lisent cum laudibus. * Ecclesiasti,, cap. XLIV, v. 1.

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3 Allusion à ce qui est rapporté dans les Nombres, chap. xvп, v. 8-13.

III.

« Dans les deux livres précédens j'ai réuni les hymnes quotidiennes des féries et celles qui sont particulières aux solennités diverses; reste maintenant pour la gloire du Roi céleste et pour l'encouragement des fidèles à exalter dans des hymnes suivant la mesure de nos forces, par de justes louanges, la cour du suprême palais. Dans cette œuvre, mon principal soutien sera le mérite de ceux dont je célébrerai la glorieuse mémoire, suivant ce qui est écrit: « La mé» moire du juste sera louée » et encore : « Louons les hommes glorieux, etc. » Et vous, mes très chères sœurs, vouées à Jésus-Christ, vous dont les sollicitations m'ont fait entreprendre cette œuvre, joignez à mes efforts la dévotion de vos prières, vous souvenant de ce bienheureux législateur qui a fait plus en priant qu'un peuple entier en combattant. Et pour que votre charité ne m'épargne pas vos prières, songez avec quelle prodigalité nous avons exaucé vos demandes. En essayant de louer la grace divine suivant notre faible génie, nous avons compensé par la multitude des hymnes ce qui pouvait nous manquer du côté de l'éloquence, composant des hymnes particulières pour chaque nocturne de chaque solennité, tandis que jusqu'à ce jour on ne chantait qu'une hymne aux nocturnes des fêtes et des féries. Nous avons fait quatre hymnes pour chaque fête, afin qu'on

4 Le copiste a évidemment passé ici un mot tel que virtute ou l'équivalent. 5 Aujourd'hui comme du tems d'Abailard on ne dit qu'une hymne aux nocturnes, immédiatement après le psaume venile et l'invilatoire.

Dans les fètes il y a trois nocturnes et dans les féries un seul. Il paraissait à Abailard contraire à la raison que de ces trois nocturnes le premier eût seul une hymne.

7 Cette manière de parler jointe à ce qu'un peu plus bas Abailard ne met que quatre psaumes à vèpres, donne à penser qu'à cette époque, dans la circonscription ecclésiastique où était située la prieurée du Paracle!, on suivait l'office analogue à celui de Saint-Benoit, dans lequel les laudes sont sans hymnes et les vêpres n'ont que quatre psaumes.

Nous ferons, relativement à ce paragraphe, une observation qui nous parait indispensable pour expliquer un passage que son extrême concision rend peut-être plus obscur que nous ne l'avions pensé d'abord. Cette observation

puisse chanter une hymne à chaque nocturne, et qu'il y en ait encore une pour les laudes. Et pour ces quatre hymnes nous avons établi que pour la vigile on prendrait deux hymnes en une, et que les deux autres seraient également réunies pour être chantées à vêpres au jour de la solennité, ou bien qu'en les conservant ainsi deux à deux pour chaque vêpres on chante une de ces hymnes doubles avec les deux premiers psaumes, et l'autre avec les deux derniers. J'ai composé également, il m'en souvient, cinq hymnes pour la croix, dont la première convient à chaque heure, invitant le diacre à enlever la croix de l'autel et à l'apporter au milieu du choeur pour l'offrir à l'adoration et au salut, afin que lá solennité puisse à chaque heure du jour, se passer en présence de la croix. »

Alexandre le NOBLE.

nous est suggérée par le même et savant ecclésiastique dont nous avions déjà eu lieu de signaler les utiles conseils précédemment, M. l'abbé Sionnet du clergé de Saint-François, et l'un des rédacteurs ordinaires de ce recueil. Abailard voulait sans doute que les quatre hymnes composées pour les nocturnes et laudes se récitassent encore à la vigile de la fète, c'est-à-dire en nocturne de celte vigile, et aussi aux vêpres de la solennité; mais comme il ne fallait qu'une hymne pour chacune de ces parties de l'office, il propose de réduire ces quatre hymnes à deux, en n'en faisant qu'une des deux premières et une des deux dernières. Dans la crainte que cette combinaison ne satisfasse pas les religieuses du Paraclet, il leur propose de laisser ces quatre hymnes telles qu'il les a composées, mais d'en réciter deux aux premières vêpres de chaque solennité, et deux aux secondes en divisant l'office d'une manière nouvelle. D'après ce plan, les deux premiers psaumes de chacune des vèpres auraient été suivis du chant d'une autre hymne, et ainsi les quatre hymnes auraient été employées deux fois dans le corps de l'office.

Nole du Directeur des Annales. - Nous n'avons pas besoin de faire remarquer qu'Abailard n'avait pas connu l'esprit de l'Église, lorsqu'elle conserve des hymnes qui ne se rapportent ni aux heures ni au tems où on les récite. L'Eglise, essentiellement conservatrice de la tradition, n'a rien changé à ces hymnes, parcequ'elles nous conservent la forme de la prière antique depuis David, et probablement plus anciennement encore. D'ailleurs il est bien des priants dans l'Eglise qui gardent encore cet ordre; ces reproches sont donc sans portée et surtout faits sans intelligence.

Philologie Sacrée.

DE LA PRONONCIATION DU TÉTRAGRAMMATON

DES HÉBREUX.

A M. A. Bonnetty, membre de l'Académie pontificale de la religion catholique, rédacteur des Annales de philosophie chrétienne.

MONSIEUR ET SAVANT AMI,

Dans votre journal, si précieux pour tous ceux qui cultivent les sciences religieuses, vous avez publié une suite d'articles sur la synglosse du nom de Dieu. Permettez que je vous adresse une dissertation sur la vraie prononciation du nom divin tétragrammatique, en lui assignant les points-voyelles qui lui sont propres en hébreu.

L'étude la plus intéressante, la plus importante, sur le nom Jehova, celle vraiment digne de fixer l'attention la plus sérieuse de tout hébraïsant chrétien, c'est au point de vue de l'importance théosophique qu'il paraît avoir eu dans la synagogue ancienne. Les savans et religieux orientalist es, à la vigoureuse érudition, des derniers siècles, à la tête desquels marchent l'auteur de l'immortel ouvrage Pugio Fidei, et Joseph de Voisin, ont reconnu toute l'importance du nom ineffable sous ce rapport, et y ont consacré de longues recherches, de profondes méditations.

En effet, la synagogue ancienne déposait, en quelque sorte, dans le Tetragrammaton les vérités qui servent de base à la rédemption qu'elle attendait d'un Messie à venir. Ces vérités comprennent nécessairement la doctrine de la trinité du Dieu essentiellement un. J'ose espérer d'avoir démontré ce point d'une manière incontestable dans mon ouvrage : De l'harmonie entre l'Église et la synagogue. Les monumens les plus authentiques de cette synagogue, non encore abâtardie, nous apprennent que le peuple de Dieu était dans l'expectation plus ou moins prochaine de l'avénement d'un Messie, Sauveur,

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