Page images
PDF
EPUB

» l'or et l'argent ne sont pas estimés. Le commerce est libre et l'on » ne marchande pas.

» Voici ce qui se pratique aux mariages. Celui qui désire épouser » une fille établit sa cabane devant la porte de celle-ci ; il y arrose et » nettoie la terre tous les matins et tous les soirs. Quand il a pratiqué » cette formalité pendant un an, si la fille ne donne pas son consen»tement, il la quitte; mais si elle est d'accord avec lui, il l'épouse. » Les cérémonies de mariage sont presque les mêmes qu'en Chine. » A la mort du père ou de la mère, on s'abstient de manger pen» dant sept jours. A celle du grand-père ou de la grand'mère, on se prive de nourriture pendant cinq jours, et seulement pendant » trois à la mort des frères, sœurs, oncles, tantes et autres parens, >> Les images des esprits sont placées sur une espèce de piédestal, >> et on leur adresse des prières le matin et le soir 1. On ne porte pas » d'habits de deuil.

[ocr errors]

» Le roi ne s'occupe pas des affaires du gouvernement pendant les » trois années qui suivent son avénement au trône 2.

» Autrefois, la religion de Bouddha n'existait pas dans cette contrée. » Ce fut dans la 4o des années Ta-ming, du règne de Hiao-wou-ti

[ocr errors]

Phou-lhao, traduit: On y trouve une grande quantité de glayeuls et de pèches. Gependant le mot Phou seul ne signifie jamais glayeul, c'est le nom des jones et autres espèces de roseaux de marais, dont on se sert pour faire des nattes. Thao est en effet le nom de la pèche, mais le mot composé Phoulao signifie en chinois la vigne. A présent il s'écrit avec d'autres caractères, mais ceux employés ici sont l'ancienne orthographe du tems des Han,qui a prévalu jusqu'au 10e siècle de notre ère.

La vigne n'est pas une plante originaire de la Chine, les grains en ont été importés par le célèbre général Tchang-kian, envoyé en 126 avant notre ère dans les pays occidentaux. Il parcourut l'Afghanistan de nos jours et la partie nord-ouest de l'Inde, et revint en Chine après 13 ans d'absence. Le terme Phou-thao n'est pas originaire de la Chine, de même que l'objet qu'il désigne, il n'est vraisemblablement que la transcription imparfaite du mot grec Borpus. Les Japonais le prononcent Bou do; ils donnent ordinairement à la vigne le nom de Yebi-kadzoura, composé de yebi, écrevisse de mer, et de kad:oura, nom général des plantes grimpantes qui s'attachent aux arbres voisins. Dans le texte, M. Klaproth, malgré tout ce qu'il dit dans cette note, dexait traduire, comme nous l'avons fait dans notre mémoire, les mots Poutao, qu'il prononce Phou-thao, par raisins, et non pas par le mot vignes, qui chez nous, entraîne l'idée de culture. Les bois de l'Amérique du nord et du nord-ouest abondent en raisins sauvages, comme le dit le Samanéen; mais on n'a pas trouvé en Amérique des vignes cultivées, et ce texte, en effet, n'en parle pas. (De Paravey).

De Guignes traduit: « Pendant leurs prières ils exposent l'image du défunt. Le texte parle du chin ou génies, et non pas des âmes des défunts. 2 C'était aussi l'antique usage en Chine et dans l'Indo-Chine. (De Paravey.)

des Soung (458 de J.-C.) que cinq Pi-khieou ou religieux du » pays de Ki-pin (Cophène) allèrent au Fou-sang et y répandirent » la loi de Bouddha; ils apportèrent avec eux les livres et les images » saintes, le rituel et instituèrent les habitudes monastiques', ce » qui fit changer les mœurs des habitans 2. »

2

KLAPROTH.

A l'appui de ses idées, M. De Guignes a aussi traduit un autre passage du Nan-su, qui donne la route, par mer, de la Corée au pays de Ta-han. M. Klaproth traduit également ce passage, et il dit, en le rectifiant sur quelques points: On partait alors de Ping-yang, ancienne capitale des Coréens, sur » la côte ouest de ce royaume; on cotoyait cette presqu'ile, et après une navi»gation de 12,00 lys, on arrivait au Japon. De là, une route de 7,000 lys vers ⚫ le nord amenait au pays de Wen-chin, ou des hommes peints, tatoués; et enfin, après une navigation de 5,000 lys vers l'Orient, on atteignait le pays » de Ta-han,» pays où M. Klaproth, à tort avons-nous dit. voit seulement la grande ile Saghalien.

Mais en appliquant à ce routier par mer la même échelle de lys que lui a donnée la distance de Persépolis à Sy-ngan-fou, M. de Paravey trouve en effet 5,000 lys au nord-est, entre les Bouches de l'Amour, ou la fin de Tile Saghalien, pays de Wen-chin de ce routier, et la pointe sud du Kamtchatka, où du Ta-han; et il trouve également 7,000 lys au nord entre ledo, capitale du Japon, et ces mêmes Bouches de l'Amour.

Le routier est donc exact en ces deux parties; et s'il compte d'abord 12,00 lys par mer entre le Japon et la capitale de la côte ouest de la Corée (ce qui est évidemment une trop grande distance), c'est qu'en allant au Japon on allait d'abord toucher aux iles Licou-kie ou, qui sont en effet situées à 5,00 lys du Japon, et 7 000 de la Corée; on faisait ce détour ou bien on comptait ici de très petits lys; mais le Ta-han, n'en est pas moins le Kamtchatka. Et, dans toutes les hypothèses, le Japon, ici indiqué par son nom, pays parfaitement connu, n'a pu renfermer le Fou-sang comme le veut M. Klaproth3.

7 mars 1814.

с

Cher de PARAVEY.

' Dans l'original tchu-kia, c'est à-dire quitter sa maison ou sa famille » ou << embrasser la vie monastique. De Guignes n'a traduit que le commence

ment de ce paragraphe.

2 Extrait du n° de juillet-août 1831 des Nouvelles annales des voyages, 2' série, tome xxt, p. 53.

3 Un mot seul, quand il est bien choisi, vaut parfois une démonstration. Dans le dictionnaire de la langue du Mexique, par le P. Molina, dictionna re conservé au British museum à Londres, nous avons trouvé que le mot Lam, ou Llama, exprimait le nom des médecins chez les Mexicains; et personne n'gnore qu'au Thibet et en Tartarie les Lamas, ou prêtres bouddhistes, sont en même tems les médecins de ces contrées si peu connues, par où l'on devait, des Indes, se rendre au Fou-sang. (De Paravey.)

Polémique Catholique.

THÉODICÉE CHRÉTIENNE,

Ou comparaison de la notion chrétienne de Dieu avec la notion rationaliste, PAR M. L'ABBÉ MARET.

Avant d'entrer dans l'analyse de l'ouvrage si remarquable que vient de publier M. l'abbé Maret, nous croyons devoir faire connaître le jugement qu'en a porté Mgr l'archevêque de Paris; nous le faisons avec d'autant plus de plaisir que Mgr y signale en quelques mots les vices de tous les sytèmes que l'on cherche à répandre en ce moment en France, non seulement dans les ouvrages, mais encore dans les chaires officielles. Nous devons ajouter que le livre de M. l'abbé Maret est le recueil des leçons du cours qu'il a professé à la Sorbonne pendant l'année 1843. Voici les paroles de Mgr qui étaient adressées aux ecclésiastiques qui forment dans son diocèse la Conférence centrale.

[ocr errors]

« MESSIEURS,

Malgré les travaux que nous impose l'administration de notre diocèse, nous ne nous sommes jamais dissimulé que c'était pour nous un devoir de prémunir les fidèles, confiés à notre sollicitude, contre les pernicieuses erreurs de quelques systèmes philosophiques de notre époque.

»Ne pouvant les discuter en détail, nous nous proposons de signaler du moins leurs faux principes, la méthode erronée, employée pour les faire prévaloir, et leurs funestes conséquences.

» La nature d'une semblable discussion vous explique assez, messieurs, comment il ne nous a pas été possible d'y apporter jusqu'ici une suffisante liberté d'esprit. Nous en étions néanmoins toujours préoccupé, lorsque M. l'abbé Maret a heureusement réalisé ce projet dans une partie de sa Théodicée chrétienne. La nature mixte de la

discussion qui est à la fois philosophique et théologique, nous rendait fort difficile une approbation proprement dite. Toutefois nous recommandons cet ouvrage à votre attention, et à celle de tous les hommes instruits. Il est supérieur, ce nous semble, à l'ouvrage du même auteur sur le Panthéisme, que les catholiques et les philosophes chrétiens ont accueilli avec tant de faveur. La Théodicée vous intéressera surtout, messieurs, comme étant un antidote précieux contre les systèmes socialiste, éclectique, et contre toutes les théories anti-chrétiennes du rationalisme moderne.

» Les rationalistes, au lieu de prendre pour point de départ des vérités évidentes, des axiomes consacrés par le bon sens de tous les peuples, posent pour fondemens de leurs systèmes, quelques propopositions vagues, par exemple, celle-ci : Il n'y a qu'une substance dans le monde. Ces assertions, loin d'être des principes, c'est-à-dire des vérités premières, sont au contraire le résultat des vues les plus fausses de l'esprit et d'un égarement qui, avant toute discussion, est aperçu par l'intelligence la moins exercée. Les déductions ne peuvent être plus vraies que les principes sur lesquels on les appuie. Est-il même possible de donner le nom de déductions à cette foule d'observations très contestables, à ces analogies historiques si incertaines, produites par des esprits présomptueux, dont les idées sont continuellement brisées, en sorte qu'au lieu de marcher à leur suite dans une route facile, on perd sans cesse leurs traces de vue? On ne peut posséder une doctrine avec certitude, qu'autant que l'esprit peut y adhérer avec fermeté. Mais comment adhérer à ce qui fuit ou s'évapore quand on veut le saisir? Image vraie et sensible de ces trompeuses théories dont les auteurs eux-mêmes sont si peu satisfaits, qu'ils les modifient ou les abandonnent avec une mobilité qui suppose une absence complète de conviction. A l'aide d'une semblable méthode, il n'est point d'erreur que le rationalisme ne soit capable de soutenir; mais il lui suffirait d'avoir produit la plus fondamentale des erreurs, celle qui altère la notion de Dieu, pour assurer le triomphe de toutes les autres. Tout, ainsi que le dit avec raison M. l'abbé Maret, découle de cette notion: « Le droit et le devoir, » le bien et le mal, les espérances et les craintes, la consolation » et le désespoir, la force et la faiblesse de l'homme, la religion,

» la morale, la philosophie, tout en un mot dérive de l'idée plus ou >> moins vraie que l'on se forme de la Divinité. »

» Peut-être, messieurs, qu'absorbés par les fonctions de votre ministère et accoutumés à rencontrer des erreurs bien différentes parmi ceux qui viennent vous révéler les secrets de leur conscience, vous serez tentés de ne pas attribuer à de faux systèmes métaphysiques une action morale aussi effrayante. Ne nous y laissons pas tromper, messieurs; c'est sans doute dans les mauvaises passions du cœur humain que prennent leur source la plupart des égaremens qui troublent l'existence de l'homme, et portent le désordre dans la société; mais trop souvent aussi, ces passions, après avoir obscurci l'intelligence, lui font produire des erreurs purement métaphysiques, et celles-ci, une fois adoptées, justifient, fécondent, multiplient à l'infini les erreurs morales.

>> Il faudrait être bien étranger à l'histoire de la philosophie, pour ignorer l'influence exercée sur tout un siècle par une erreur ou une vérité philosophique, protégée par des génies assez puissans pour dominer leur siècle.

>> Descartes n'a donné au sien une si heureuse impulsion, que parcequ'il a respecté les dogmes chrétiens, pendant qu'il appelait l'esprit humain à poursuivre avec une ardeur et une indépendance encore inconnues la solution de tous les problèmes placés en dehors des vérités révélées.

» Au contraire, Locke a jeté plus d'un philosophe dans le matérialisme, en hésitant à affirmer si Dieu pouvait ou ne pouvait pas communiquer à la matière la faculté de penser. Ses disciples, à leur tour, ont produit des théories qui ont eu sans doute quelques résultats favorables pour les sciences physiques et l'amélioration matérielle de l'homme, mais qui ont produit aussi sous le rapport religieux et moral des maux incalculables pour la France et l'Europe.

» L'erreur des matérialistes est une erreur prodigieusement destructive, puisqu'elle anéantit la liberté de l'homme, fait disparaître toute sanction de la loi naturelle, et rend cette loi elle-même impossible. Mais une erreur plus fondamentale encore, est celle qui remonte jusqu'à Dieu, nie son existence, le confond avec la nature, ou le fait évanouir dans d'insaisissables abstractions.

« PreviousContinue »