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L'activité de Van Mons était inépuisable; il possédait surtout la faculté assez rare de faire marcher de front des études et des occupations fort diverses. Au moment où l'orage révolutionnaire grondait encore, il venait faire, dans la Société de médecine de Bruxelles, de paisibles lectures sur la matière colorante végétale, sur la nature du parenchyme des plantes, ou l'action de la lumière sur les corps organiques. On le voyait passer avec la plus grande facilité des affaires publiques à celles de la science. L'intérieur de sa maison, sous ce rapport, était vraiment digne de l'attention de l'observateur: on le voyait recevoir dans la même chambre ses amis et ses malades, mêler des causeries scientifiques à des consultations médicales, et y joindre souvent les discussions de la politique la plus ardue et la plus élevée. Cette activité, sans être notablement altérée par l'âge, finit par s'étendre à un moins grand nombre d'objets. La chimie, la physique, la pharmacie, l'horticulture, furent les points sur lesquels elle parut se concentrer vers la fin de sa vie. Carrière étendue, honorablement remplie, digne en tous points d'exciter l'émulation et les respects des générations appelées à recueillir les fruits de tant de zèle, de recherches et de talent (1).

(1) Voici la liste des ouvrages publiés par Van Mons: I. Essai sur principes de la chimie antiphlogistique, in-8, Bruxelles, 1785. II. Pharmacopée manuelle. Bruxelles, an IX (1800). III. Censura commentarii à Wieglebo nuper editi de vaporis in aerem conversione. Bruxelles, an IX, in-4. — Journal de chimie et de physique. Bruxelles, an IX, X et XI (1800 à 1802). — V. Principes d'électricité ou confirmation de la théorie électrique de Franklin. Bruxelles, an IX (1802). - VI. Synonymie des nomenclatures chimiques modernes, traduit de de l'italien de Brugnatelli. 1802, in-8. — VII. Théorie de la combus

tion. In-8.Bruxelles, 1802.

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VIII. Lettre à Bucholz sur la formation

des métaux en général, et en particulier ceux de Davy, ou Essai de réforme générale de la théorie chimique, in-8. Bruxelles, 1810. IX. Principes élémentaires de chimie philosophique avec des applications générales de la doctrine des proportions déterminées. Bruxelles, 1818, un vol. in-12. X. Annales générales des sciences physiques, par MM. Bory de Saint-Vincent, Drapiez et Van Mons. Bruxelles, 1819. XI. Pharmacopée usuelle, théorique et pratique. Louvain, 1821, 1822, un vol. in-8. XII. Conspectus mixtionum chimicarum. 1 vol. in-12. Louvain, 1827. XIII. Materia medico-pharmaceuticæ compendium, 1829. Louvain, 1 vol. in-8. XIV. Abrégé de chimie à l'usage des leçons. Louvain, 1831 à 1835, 5 vol. in-12. XV. Arbres fruitiers et leur culture. Louvain, 1835-1836, 2 vol. in-12. XVI. La chimie des Éthers. Louvain, 1837, un vol. in-12 (il devait y en avoir trois). -XVII. Sur les trois nouveaux corps chimiques, les métallofluores, l'iodine et l'huile détonante de Dulong. —XVIII. Philosophie chimique ou vérités fondamentales de la chimie moderne, par Foureroy; nouvelle édition augmentée de notes et d'axiomes, etc. Bruxelles, an III (1794), 1 vol. in-8. - XIX. Préface et addition aux éléments de philosophie chimique de Davy, 1813-16, 2 vol. in-8. Bruxelles. - XX. Pharmacopeia medici pratici universalis, etc., par Swediaur, avec notes et additions. Bruxelles, 3 vol. in-8, 1817. XXI. Faits et vues détachés, en rapport avec le différend sur certains points de théorie chimique, etc. 2 vol. in-8 inachevés.

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On trouve en outre dans les Mémoires de l'Académie royale de Bruxelles, les travaux suivants : 1o Mémoire sur la réduction des alcalis en métaux, tome 1, mai 1823. 2o Mémoire sur quelques erreurs concernant la nature du chlore, et sur plusieurs nouvelles propriétés de l'acide muriatique, tome 111, novembre 1823. 3o Quelques particularités concernant les brouillards de différentes natures, tome iv, avril 1827. 4o Mémoire sur une particularité dans la manière dont se font les combinaisons par le pyrophore, tome x1, juillet 1835. 50 Mémoire sur l'efficacité des métaux compactes et polis dans la construction des pyrophores, tome x1, juillet 1835.

LABARRAQUE

(1777-1850).

Antoine-Germain Labarraque naquit le 29 mai 1777, dans la petite ville d'Oloron (Basses-Pyrénées) (1). Enlevé prématurément à ses études par les exigences du service militaire, il fit partie des grenadiers de la Tour-d'Auvergne, et une action d'éclat lui mérita une promotion sur le champ de bataille. Tandis qu'il tenait garnison sur les frontières d'Espagne, à Saint-Jean-de-Luz, pour utiliser ses loisirs, il remplit les fonctions d'élève dans une pharmacie tenue par de respectables demoiselles chez lesquelles il était logé. Par suite de ces connaissances rapidement acquises, et dans la disette de sujets propres au service des hôpitaux, il fut désigné, à peine âgé de vingt ans, comme pharmacien, et même pharmacien en chef d'un hôpital espagnol, celui de Berra. L'excès du travail, les privations, l'insalubrité lui firent contracter le typhus, maladie pendant laquelle, disait-il,

(1) Sa ville natale, heureuse de son illustration, a fait placer sur la maison où naquit Labarraque, une plaque de marbre où sont rappelées la date de sa naissance et celle de sa mort avec ces mots : « En 1795, la Tour d'Auvergne le distinguait sur le champ << de bataille. En 1825, l'Académie des sciences de l'Institut de France • couronnait ses travaux sur les chlorures. »

on lui fit avaler plus de médicaments qu'il n'en avait encore préparé. Sa jeunesse et sa robuste constitution le firent heureusement résister à la maladie comme aux remèdes. A peine convalescent, il fut licencié et évacué sur la France. Au moment où il traversait Saint-Jean-de-Luz, il s'élança de la charrette dans laquelle on le transportait, pour venir tomber évanoui dans l'officine où il avait été reçu et traité avec tant de bonté. Il y retrouva les mêmes soins et la même affection. Le souvenir s'en était si bien conservé dans son âme, qu'il n'en parlait jamais que les larmes aux yeux, et qu'à plus de soixante-dix ans il voulut aller revoir les lieux où il avait contracté de si douces obligations. Il y retrouva, non plus les demoiselles Mouhaut, mais leur parent et leur successeur, à qui ces excellentes personnes avaient imposé la condition de conserver intacte la chambre qu'avait habitée Labarraque, leur enfant d'adoption.

Cependant, il avait pris goût à la pharmacie, et devenu libre, il alla à Montpellier pour y puiser les éléments de cette profession. Il y suivit les cours de Chaptal. A la fin de son noviciat, il vint à Paris, où il entra chez Bertrand Pelletier, membre de l'Institut, qui lui permit de suivre les leçons de Vauquelin. Reçu pharmacien en 1805 et établi dans la capitale, il lut à la Société de pharmacie un travail sur la dissolution du phosphore, et à la Société de médecine un Mémoire sur les électuaires, qui lui ouvrirent les portes de ces deux compagnies.

Lorsque Labarraque était élève dans la maison Pelletier, il y fit la connaissance du célèbre Corvisart, qui le prit en amitié et voulait l'attacher à la maison de l'Empereur. Une circonstance singulière fit avorter ce projet.

Une nuit que Corvisart était venu faire préparer par son élève de confiance une potion destinée au Premier Consul, et dans laquelle devait entrer du suc de citron, il fallut pour cela éveiller un épicier du voisinage, ce qui causa un retard, pendant lequel Corvisart manifesta la plus grande impatience. Labarraque essaya de le calmer en lui disant que quelques minutes de plus n'empêcheraient pas le médicament d'opérer son effet. Mais, malheureux, s'écria Corvisart, tu ne sais donc pas que si je ne suis pas à quatre heures du matin près du Premier Consul avec la potion, il me la jettera à la figure. Que dites-vous? reprit Labarraque. S'il en est ainsi, je ne puis pas être son pharmacien, car s'il me faisait un pareil outrage, je l'étranglerais.... Paroles qui, assurément, sentent d'une lieue le jeune homme et le méridional, mais qui témoignent aussi dans Labarraque d'un honorable sentiment de sa dignité.

Labarraque ne s'était distingué jusque-là que comme un pharmacien instruit et honorable, lorsqu'en 1820, le programme des prix proposés par la Société d'encouragement pour l'industrie nationale, le plaça tout à coup sur un nouveau théâtre, Le programme portait cette question: « Trouver un procédé chimique ou mécanique pour en« lever la membrane muqueuse des intestins traités dans « les boyauderies, sans employer la macération, et s'op« posant à la putréfaction. Décrire la manière de préparer « les boyaux par insufflation. »

Il fallait un véritable courage pour entreprendre les expériences qu'exigeait la solution d'un pareil problème. Ce courage ne manqua pas à notre collègue. Il alla étudier dans des ateliers infects les détails de l'art du boyau

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