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jugements rendus contre eux par la commission d'instruction publique a lieu à la diligence du procureur du roi.

$ Ier.

De la juridiction et de la discipline à l'égard des membres de l'université.

Les membres de l'université contractent par serment, lors de leur installation, des obligations civiles, spéciales et temporaires, qui les lient au corps enseignant.

et maîtres d'étude, qui, sans cause légitime, se dispenseraient de faire leurs leçons ou de remplir leurs fonctions, sont pointés et subissent une retenue proportionnelle sur leur traitement par chaque jour d'absence; en cas de récidive, ils sont réprimandés, et peuvent même être suspendus de leurs fonctions, avec privation de traitement, pendant le temps qui est arbitré par le grand maître assisté du conseil royal, sur l'avis du conseil académique.

Tout membre de l'université qui manque à la subordination établie par les statuts et règlements, et au respect dû aux supérieurs, doit Les peines de discipline qu'entraîne la vio-être réprimandé, censuré, ou suspendu de ses lation des devoirs et des obligations de ces membres, sont :

1o Les arrêts;

2o La réprimande en présence d'un conseil académique;

3o La censure en présence du conseil de l'université;

4o La mutation pour un emploi inférieur ; Bo La suspension de fonctions pour un temps déterminé, avec ou sans privation totale ou partielle du traitement (1);

6o La réforme ou la retraite donnée avant le temps de l'éméritat, avec un traitement moindre que la pension des émérites;

7° Enfin, la radiation du tableau de l'université (2).

Le grand maître pouvait, de sa seule autorité, infliger les arrêts, la réprimande, la censure, la mutation et la suspension des fonctions; mais la réforme et la radiation du tableau né pouvaient être prononcées que par le conseil de l'université. Aujourd'hui, l'application qu'il peut faire de ces peines est subordonnée à l'approbation du ministre de l'intérieur (5).

Le grand maître, assisté du conseil royal, est juge des plaintes des supérieurs et des réclamations des inférieurs, quand il s'agit d'abus d'autorité, d'excès de pouvoir, et en général de l'interprétation des règlements.

Tout membre de l'université, tout maître de pension ou chef d'institution, qui s'écarterait des bases d'enseignement prescrites par les lois et règlements, doit être, selon la nature et la gravité de l'infraction, censuré, ou puni par la suspension de ses fonctions, la réforme ou la radiation.

Les professeurs, censeurs, régents, agrégés

fonctions, selon la gravité des cas.

Si un membre de l'université est repris pour des faits portant le scandale dans la maison à laquelle il appartient, ou blessant la délicatesse et l'honnêteté, il est rayé, réformé, censuré ou réprimandé, selon le cas.

Le membre de l'université qui abandonne ses fonctions sans avoir observé les conditions exigées par l'art. 45 du décret du 17 mars 1808, est raye du tableau de l'université, et est en outre condamné à une détention proportionnée à la gravité des circonstances, mais dont la durée ne peut excéder un an.

Le jugement qui la prononce est adressé au procureur du roi, qui est tenu d'en suivre l'exécution.

Si un membre de l'université divertit les deniers qui lui auraient été confiés, il est rayé du tableau et condamné à la restitution, sans préjudice de l'action criminelle qu'il pourrait y avoir lieu d'exercer devant les tribunaux (4).

Les injures verbales ou par écrit entre les membres de l'université sont punies, sur la plainte de la partie offensée, par la réprimande ou la censure, suivant les cas; il doit, d'ailleurs, être fait à l'offensé telle excuse et réparation que la commission estime convenable.

Si un membre de l'université se permet des voies de fait contre un autre membre, il est puni par la censure et par la suspension de ses fonctions, qui, dans ce cas, ne peut être audessous d'un mois, avec privation de traitement; si les voies de fait avaient lieu d'un inférieur à un supérieur, le coupable serait rayé du tableau de l'université.

Si un membre se rendait coupable de diffamation ou d'outrage envers un autre membre,

(1) En aucun cas cette suspension ne peut excéder trois mois. . l'art. 67 du décr. du 15 nov. 1815. (2). le décr. du 17 mars 1808, art. 17.

Nota. La radiation du tableau rend incapable d'être employé dans aucune administration publique, art. 48 du décr. du 15 nov. 1815.

(3) V. dans Fontanon, tome IV, le Recueil des statuls de l'université de Paris, depuis la p. 415 jusqu'à la p. 456.

(4) L'économe d'un collége royal, prétendu respon

sable de la perte d'une somme considérable, peut-il être jugé et condamné sur cette question de responsabilité (tout aussi bien que sur une pure question de comptabilité) par le conseil royal de l'université ?

Résolu affirmativement par une ordonnance du roi rendue en conseil d'Etat le 31 mars 1825, dans une espèce où l'économe du collége Henri IV avait été volé d'une somme de 15,901 fr. 37 centimes, par un domestique du collège qui, pour ce fait, avait été condamné à 20 ans de fers. (S., 25, 359.)

il serait puni par la suspension de ses fonctions, | avec privation de traitement pendant trois mois, même par la radiation du tableau de l'université, avec affiche de l'ordonnance, suivant la gravité des cas.

Tout membre de l'université qui, sous prétexte de punition, se sera permis, à l'égard des élèves, des peines interdites par les règlements, ou aucuns mauvais traitements, peut être puni, selon l'exigence des cas, de la censure, de la suspension ou de la destitution; le tout sans préjudice de la poursuite devant les tribunaux, dans le cas où les parents voudraient s'y pourvoir, ou dans le cas de poursuites d'office du ministère public.

Le supérieur qui abuse de son autorité envers son inférieur, doit être réprimandé ou censuré, selon les circonstances.

Toute récidive peut être punie de la peine immédiatement supérieure à celle qui aurait été antérieurement infligée.

Tout membre de l'université qui refuserait de se soumettre aux ordonnances ou jugements qui le concernent, après en avoir été sommé et avoir été préalablement averti de la peine, doit être contraint de le faire par justice.

Dans le cas où des tiers seraient intéressés dans la contestation, elle doit être portée devant les tribunaux, si les tiers ne consentent pas à s'en rapporter au jugement de la commission d'instruction publique.

Les réclamations et les plaintes contre les membres de l'université doivent être portées devant le recteur de l'académie dans le ressort de laquelle le membre inculpé exerce ses fonctions: elles peuvent aussi être adressées aux doyens des facultés, aux proviseurs ou autres chefs des maisons où le membre inculpé est en exercice; ceux-ci sont tenus de les faire passer au recteur. Elles peuvent toujours être portées directement au grand maître et au conseil royal.

Les recteurs ont le droit de suspendre provisoirement de leurs fonctions les membres contre lesquels l'inculpation portée pourrait donner lieu à la réforme ou à la radiation; mais ils doivent en rendre compte à la commission.

Les titres IV, V et VI du décret du 15 novembre 1811 traitent du mode d'instruction des différentes affaires qui sont de la compétence de l'université, des jugements et de leur exécution.

Les actes de juridiction émanés du grand maitre seul sont qualifiés d'ordonnances; ceux qui émanent du conseil royal de l'instruction publique portent le titre de jugements. Je pense du moins que cette distinction est encore observée.

L'art. 149 du même règlement autorise le recours au conseil d'État contre les jugements rendus en matière de contraventions aux de

voirs et de délits entre les membres de l'université, mais seulement dans le cas où le jugement prononce la radiation du tableau. Le recours n'est admis pour aucune autre peine.

S II.

De la juridiction et de la discipline à l'égard des élèves.

Les élèves des lycées et des colléges, lorsqu'ils sont au-dessous de seize ans, ne sont justiciables que de l'université pour les délits qu'ils auraient commis dans l'intérieur de ces maisons, sauf ce qui sera dit ci-après relativement à l'action de la justice et de la police ordinaire : ils peuvent être punis, selon la gravité des cas, d'une détention de trois jours à trois mois dans l'intérieur de l'établissement, et dans un local destiné à cet effet.

Si les parents s'opposaient à l'exécution de cette mesure, l'élève leur serait remis, et il ne pourrait plus être reçu dans aucun college de l'université; il pourrait même être renvoyé, le cas échéant, à la justice ordinaire.

Quant aux délits commis par les élèves au dehors, dans les sorties ou promenades faites en commun, la partie lésée a le droit d'en poursuivre la réparation par les voies ordinaires, si elle n'aime mieux s'en rapporter à la décision de l'université. Dans tous les cas, le chef de l'établissement est civilement responsable du dommage causé par l'élève, sauf son recours contre les père et mère ou tuteur, s'il peut prouver qu'il n'a dépendu des maîtres de prévoir ni d'empêcher le délit.

Les élèves peuvent être exclus des lycées ou colléges pour causes graves, telles que la désobéissance obstinée et continue envers les maitres et supérieurs, les menaces et voies de fait envers les mêmes, les atteintes aux mœurs et à la probité, l'insubordination habituelle et la provocation à la désobéissance.

Un décret du 1er juillet 1809 a réglé le mode d'application de cette mesure. L'exclusion ne pouvait et ne peut être prononcée que par le grand maître avant même qu'il y ait lieu de la provoquer, on doit avertir les parents de la nécessité de retirer leur enfant du college, pour le soustraire aux effets fâcheux de l'exclusion.

On ne lit point dans les statuts de l'universite, ou du moins dans les décrets et dans les ordonnances qui s'y rattachent, que le grand maître ou le conseil royal soient investis du droit d'interdire l'entrée de toute école spéciale, par exemple, de toute école de droit ou de médecine, à un élève qu'on aura expulsé d'une autre; et l'on conçoit, en effet, que ce droit qui équivaut en quelque sorte à la faculté de prononcer la privation des droits civils, dont les tribunaux seuls sont investis, dans des cas nominativement prévus par les lois, ne pouvait

voulu que, hors le cas de flagrant délit, d'incendie ou de secours réclamés de l'intérieur des colleges ou autres écoles publiques appartenant à l'université, aucun officier de police ou de justice ne puisse s'y introduire, soit pour constater un délit, soit pour exécuter un mandat d'amener ou d'arrêt délivré contre des membres ou élèves de ces établissements, s'il n'en a l'autorisation spéciale par écrit du procureur général, d'un de ses substituts où du procureur du roi.

guère être conféré à une autorité administra- avec l'intérêt de la société blessée et de la justice tive. Cependant, il est de fait que dans quel-offensée, le décret du 15 novembre 1811 a ques écoles, et notamment à celle de droit de Rennes, ce moyen de répression a été mis en usage, et que des élèves, expulsés pour diverses causes, n'ont pu, malgré leurs réclamations, ètre admis à aller prendre des inscriptions et terminer leurs études dans des facultés établies sur d'autres points du royaume; et ces exemples de sévérité doivent rendre la jeunesse d'autant plus circonspecte, que, dans les temps de trouble ou d'agitation politique, lorsque les nuances d'opinions sont encore extrêmement marquées, des tours d'écoliers, et, s'il est permis de s'exprimer ainsi, des farces de jeunes gens, inaperçus à d'autres époques ou du moins tolérés et facilement excusés par l'autorité, peuvent alors être transformés, par l'esprit de parti, en mouvements séditieux, en actes de rébellion, et devenir ainsi, pour ceux à qui on les impute, la cause d'un malheur irréparable, savoir : la privation totale de l'instruction et des moyens de se faire un état, de prendre rang dans la société.

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Les procureurs généraux sont chargés spécialement de l'examen et de la poursuite, s'il y a lieu, des crimes ou délits qui seraient commis dans l'intérieur de ces établissements par des membres de l'université ou des étudiants ; ils peuvent requérir et les cours royales ordonner que les prévenus seront jugés dans la forme prescrite par l'art. 479 du Code d'instruction criminelle et par l'art. 10 de la loi du 20 avril 1810, pour la mise en jugement de certains fonctionnaires (1).

Ils sont tenus de rendre compte particulièrement de ces sortes d'affaires au ministre de la justice, et ils doivent en instruire également le ministre de l'intérieur et la commission qui remplace le grand maître.

Tout membre de l'université qui a subi une condamnation en police correctionnelle, peut, selon les circonstances, être réprimandé, cen suré, réformé, ou rayé du tableau.

Enfin, si un membre de l'université est repris de justice et condamné pour crime, il cesse, par le fait même de sa condamnation, d'être membre de l'université, et sa dégradation doit lui être prononcée par le président de la cour.

(1). nos 137 et suiv. et 300.

L'ord. du 8 avril 1824 a modifié les règlements antérieurs relativement au grand maître. L'ord. du

26 août 1824 a créé un ministre de l'instruction publique, chargé d'exercer les fonctions de grand maître de l'université.

CHAPITRE XVII.

DE LA RÉVISION (1).

365. Nous avons vu comment les arrêts et jugements de condamnation (ou d'absolution) rendus en dernier ressort peuvent être attaqués par la voie du recours en cassation, et annulés dans le cas d'incompétence ou d'excès de pouvoir, ou lorsque les formes prescrites à peine de nullité ont été violées, ou qu'il a été fait une fausse application de la loi mais l'effet de cette annulation n'est pas définitif; et sauf les cas où l'annulation n'est prononcée que dans l'intérêt de la loi, et sauf aussi ceux où un individu a été condamné pour un fait qui n'avait pas, d'après les lois existantes, le caractère de erime, de délit ou de contravention, les individus dont la condamnation est annulée sont toujours renvoyés devant d'autres cours ou d'autres tribunaux pour y subir de nouveaux jugements (2).

En parlant de la prescription des peines, nous verrons aussi que les arrêts ou jugements de condamnation se trouvent annulés au bout d'un certain laps de temps, du moins quant à la peine corporelle (3); mais, outre ces deux modes d'annulation des jugements, dont l'un est dans l'ordre ordinaire des juridictions, et dont l'autre n'est dù qu'à la faveur du temps qui s'est écoulé depuis la condamnation, les arrêts et jugements définitifs de condamnation peu

vent encore être annulés dans trois autres cas et de trois autres manières différentes.

Deux de ces manières, savoir la révision et la grâce, sont spécialement prévues par les lois, qui en ont déterminé les règles, les formes et l'exercice. La troisième, savoir: l'amnistie, n'existe, en quelque sorte, que dans l'usage,

et ne pouvait pas être réglée par la loi.

Nous parlerons d'abord de la révision, comme tenant en quelque sorte encore à la legislation et même à la procédure criminelle ordinaire, quoique réservée pour des cas extraordinaires.

Nous examinerons ensuite, dans ses détails, le mode d'exercice du droit de grâce, et les effets que produisent les actes de la clémence souveraine. Enfin, en rappelant les amnisties publiées jusqu'à nos jours, les circonstances qui y ont donné lieu, la manière dont ces actes ont été conçus, entendus et expliqués, nous trouverons des éléments sûrs pour indiquer, à cet égard, un mode d'exécution qui puisse diriger la marche des tribunaux et prévenir les

erreurs.

La révision, autorisée par l'ordonnance de 1670 (4), supprimée par les fois de l'assemblée constituante (5), avait été rétablie en 1793 pour le cas seulement où deux condamnations étaient inconciliables (6); elle avait disparu de nouveau par la mise en activité du Code du 3 brumaire an IV, qui n'en avait rien dit, et dont l'article 594 déclarait abolie toute forme de procéder et de juger en matière criminelle qui ne s'y trouvait pas rappelée. Les partisans du jury avaient craint, sans doute, que la confiance que devait inspirer cette institution ne se trouvât affaiblie par la seule supposition que des jurés fussent tombés dans l'erreur; ils avaient craint que le respect dont les organes de la loi et les arrêts de la justice doivent être environnés, ne reçût quelque atteinte d'une disposition qui, après l'accomplissement de

(1) Il ne s'agit pas ici du recours en révision établi pour les jugements émanés des conseils de l'armée de terre et de mer, et qui tient lieu, en quelque sorte, du recours en cassation en matière ordinaire. On peut voir, sur cette espèce de révision, mon Traité de la procédure criminelle devant les tribunaux militaires et maritimes de toute espèce, et dans cet ouvrage-ci, les nos 346 et suiv. et 357 et suiv.

(2) V. nos 301 et suiv.

(3) V. infrà, no 376.

(4) V. au titre XVI de cette ordonnance, les art. 8 et suiv. V. aussi, sur les lettres de révision, Muyart de Vouglans, p. 603; Rousseaud de la Combe, p. 521 et suiv.; et Jousse, t. II, p. 375, 772 et suiv.

(5). le décr. des 8 et 9 oct. 1789.-Par décr, du 19 août 1792, l'assemblée législative autorisa la Cour de cassation à prononcer sur les demandes de révision antérieures à la loi de 1789.

(6) . la loi du 15 mai 1795.

toutes les formalités ordinaires et l'épuisement | un viol, etc., aura été commis, et il sera bien de tous les degrés de juridiction, offrirait en- démontré que le crime a été exécuté par une core un moyen d'attaquer, et même de faire seule personne : si deux individus ont été sucanéantir, dans des circonstances données, un cessivement condamnés pour ce fait, la révision arrêt définitif de condamnation. pourra être réclamée avec succès.

:

Ces considérations étaient importantes; et l'examen de cette matière, la décision dont elle devait être l'objet, la fixation des règles auxquelles serait assujettie la révision, en supposant qu'elle dût être admise, réclamaient toute la circonspection, toutes les méditations du législateur mais il était juste, il était indispensable de rétablir une barrière contre les erreurs possibles des jurés et des juges; et l'on ne peut regarder que comme une réparation insuffisante, en pareil cas, l'exercice du droit de grâce en faveur de celui qui aurait évidemment été victime d'apparences trompeuses ou de fausses dénonciations (1).

La révision a donc été consacrée de nouveau pour les cas seulement où elle a paru réclamée par l'intérêt même de la justice, et sans que celui de la société pût en recevoir d'atteinte. La loi contient, à cet égard, des règles claires et précises; mais, pour mieux les apprécier, il peut être utile de consulter ce que disait l'orateur du gouvernement en présentant au corps législatif le titre du Code d'instruction criminelle qui contient ces règles (2).

La révision des arrêts criminels portant condamnation peut avoir lieu dans trois cas, suivant les formes particulières qui sont déterminées pour chacun d'eux. La Cour de cassation est toujours associée à l'exécution de cette mesure extraordinaire : elle est chargée par la loi de prendre connaissance des demandes en révision, d'examiner si elles sont fondées; de faire, en quelques circonstances, les actes préparatoires pour s'assurer de l'exactitude des faits ou des motifs allégués à l'appui des demandes; enfin d'annuler, lorsqu'il y a lieu, les arrêts de condamnation, et de désigner la cour devant laquelle doivent être portées les affaires qui sont jugées susceptibles de révision.

Ilya lieu à révision, lorsqu'un accusé ayant été condamné pour un crime, un autre accusé a aussi été condamné par un autre arrêt comme auteur du même crime, et que les deux arrêts ne peuvent se concilier et sont nécessairement la preuve de l'innocence de l'un ou de l'autre condamné (art. 443, C.crim.). Ainsi, par exemple, un assassinat, un vol,

La loi veut que, dans ce cas, l'exécution des deux arrêts soit suspendue, quand même la demande en cassation de l'un ou de l'autre arrêt aurait été rejetée (art. 445, C. crim.); et quoique le Code ne suppose que le rejet de l'un ou de l'autre, la voie de la révision n'en serait pas moins ouverte, quand même l'un et l'autre arrêts auraient été confirmés par la Cour de cassation, sur le pourvoi porté devant elle; quand même aussi il n'y aurait eu de pourvoi contre aucun des deux arrêts, et qu'ils eussent ainsi acquis la force de chose jugée. Cette disposition de la loi ne peut pas être considérée comme limitative; et l'on doit seulement l'entendre dans ce sens que, malgré la confirmation de la Cour de cassation, ou malgré le défaut de pourvoi en temps utile, ce qui ne permet pas ordinairement de suspendre l'exécution d'un arrêt de condamnation, l'exécution des deux arrêts, dans l'hypothèse proposée, doit néanmoins être suspendue.

Mais il importe de se bien pénétrer de l'esprit et des termes de la loi; et pour que la suspension ait lieu, et que par suite, on puisse réclamer la révision, il faut que les arrêts ne puissent se concilier et soient la preuve nécessaire de l'innocence de l'un ou de l'autre condamné.

Cette condition impérative de la loi ne sera donc pas remplie, et on ne pourra pas motiver une demande en révision, si, après que l'existence d'un crime commis de complicité aura été constatée, et qu'un individu accusé d'y avoir coopéré aura été déclaré coupable, et condamné à une peine plus forte, à raison de cette circonstance, un des coprévenus, venant ensuite à être mis en jugement, est condamné à une peine moindre, parce que la complicité n'aura pas été reconnue à son égard.

Tout ce qu'il faudra conclure de cette diversité de jugements, c'est que la preuve de la circonstance aggravante n'a pas été faite devant la cour à l'époque du second arrêt; ou que les juges se sont montrés plus indulgents ou moins clairvoyants; mais, à coup sûr, il est impossible d'en induire que les deux arrêts sont inconciliables, et il ne l'est pas moins de

(1) Tant que les hommes, dit un jurisconsulte étran»ger, n'auront aucun caractère certain pour distinguer » le vrai du faux, une des premières sûretés qu'ils se » doivent réciproquement, c'est de ne pas admettre, »sans une nécessité démontrée, des peines absolument » irréparables. N'a-t-on pas vu toutes les apparences du » crime s'accumuler sur la tête d'un accusé, dont l'in» nocence était démontrée quand il ne restait plus qu'à

» gémir sur les erreurs d'une précipitation présomp>> tueuse? Faibles et inconséquents que nous sommes ! » nous jugeons comme des êtres bornés, et nous punis» sons comme des êtres infaillibles. » (V. Jérémie Bentham, Tr. de la légist. civ. et pén.)

(2). le discours de l'orateur du gouvernement sur le chap. 3, du liv. II, C. crim.

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