Page images
PDF
EPUB
[merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small]
[graphic][merged small][merged small]

de lui être fatale à une époque où l'aristocratie du talent était proscrite avec la même rage que celle du rang et des richesses. On a prétendu que la publication d'une élégie intitulée La jeune Captive, dont quelques passages ont été imprimés depuis, et dans laquelle il dépeignait avec la plus attendrissante vérité les angoisses d'une femme qui languit dans les fers en attendant son arrêt, avait encore enflammé contre lui la rage des tyrans, qui avaient cru, non sans quelque fondement, y voir une allusion à leurs cruautés journalières. Quoi qu'il en soit, André Chénier, traduit au tribunal révolutionnaire, y fut condamné à mort le 7 thermidor an 2 (25 juillet 1794). Il venait d'entendre sa condamnation et descendait à la Conciergerie, lorsqu'on l'entendit s'écrier, en se frappant le front mourir ! j'avais là quelque chose!.. Ainsi, à l'heure fatale, ce jeune infortuné voyait apparaître dans tout son éclat ce génie qui devait l'illustrer. Le bruit se répandit alors que depuis un certain temps il méditait un grand ouvrage, dont la pensée même a péri avec lui.

CHENIER (MARIE-JOSEPH DE), frère du précédent, né le 28 août 1764, à Constantinople, fut conduit fort jeune en France, fit de très bonnes études à Paris, et obtint, en sortant du collége, une sous-lieutenance de dragous, dans un régiment alors en garnison à Niort. Il passa deux ans dans cette ville, quitta bientôt le service pour lequel il avait un invincible dégoût, et revint se fixer à Paris, où il se livra exclusivement aux travaux littéraires. Azémire fut sa première tragédie; représentée à Fontainebleau le 4 novembre 1786, elle n'y eut aucun succès, et il était à craindre que cet ouvrage ne fût pas plus heureux à Paris, lorsque, pour prévenir cette nouvelle disgrâce et déconcerter les cabales, on s'avisa du stratagème suivant: Zaïre avait été annoncée: an lever de la toile, Mlle Sainval vint informer le public que l'indisposition subite d'un acteur, mettait dans la nécessité de changer le spectacle, et qu'au lieu de

Zaïre, on allait représenter une tragédie nouvelle; c'était Azémire; la pièce fut entendue sans défaveur, mais elle ne réussit pas. Chénier, que le malheur de son premier essai n'avait point découragé, et qui, pendant trois années, consacrées au silence et à la méditation, ne s'était occupé qu'à se fortifier par de nouvelles études, dans la carrière nouvelle à laquelle il s'était voué, se releva trois ans après de cette chute, par un des succès les plus brillans dont les annales du théâtre ayent conservé le souvenir. Charles IX, représenté le 4 novembre 1789, fit courir tout Paris. Cet ouvrage qui, sous un grand nombre de rapports, mérita sa renommée, dut surtout, nous ne prétendons pas le nier, le prodigieux succès qui accompagna ses représentations, à la disposition des esprits fortement prononcés contre l'intolérance et le despotisme; au spectacle vraiment nouveau qu'offrait la scène, et surtout à la résistance également impuissante et intempestive, qu'on savait avoir été apportée par les évêques et le clergé, à la représentation de cet ouvrage. Les opinions littéraires ne furent guères moins partagées au sujet de cette production, que les partis politiques qui divisaient alors l'état. En 1791, Chénier fit représenter Henri VIII, et le succès qu'obtint cette tragédie dut flatter d'autant plus son auteur, qu'il fat entièrement dû au mérite de l'ouvrage. On a reproché à Chénier d'avoir intercallé, dans quelques scènes, des tirades qui appartenaient moins au sujet qu'aux circonstances; nous ne croyons pas cette observation fondée. Chénier écrivait d'après son ame; la haine du despotisme était en lui un sentiment dominant; et l'on ne contestera pas que peu d'hommes n'ayent justifié ce sentiment à un plus haut degré que le tyran anglais. Les traits dirigés contre la barbarie de Henri étaient donc parfaite ment à leur place; seulement, il serait peut-être possible de trouver que l'auteur paraît trop se complaire à tracer le hideux tableau de la tyrannie; mais cette critique nous semble si faible,qu'elle

« PreviousContinue »