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rement. Il s'occupa de la révision d'une nouvelle édition in-8. des Voyages de Pallas, traduits par Lapeyronie, a la quelle il ajouta, avec M. Lamarck, des notes fort étendues. Cette édition parut en 1795, huit volumes in-8., et un atlas, ainsi que sa traduction du Voyage de Thunberg au cap de Bonne-Espérance, aux iles de la Sonde et au Japon, avec ses notes et celles de M. Lamarck, 1796, in-8,4 vol., ou in-4., 2 vol. Il s'occupait en meme-temps d'une nouvelle édition in-4. du Voyage de Norden en Egypte et en Nubie, avec des notes. Les deux premiers volumes parurent en 1795. Le troisième, qui est presque entièrement composé du travail de l'éditeur, renferme des Mémoires sur le canal de Suez, sur les Pyramides,qui étaient originairement, selon lui, des monumens héliaques, sur Alexandrie, etc., composés surtout d'après les écrivains arabes. Il publia en même temps la traduction et l'extrait de la version anglaise du Voyage de l'Inde à la Mekke, par Abdoul Kérym, pélerin musulman qui accompagna Tahmas Couly Khân dans l'Inde. C'est le premier volume de sa Collection portative de voyages, traduits de différentes langues orientales et européennes, dont il a paru jusqu'à présent cinq volumes; savoir: Voyage de la Perse dans l'Inde, en 1442-44, traduit du persan d'Abdoul-Rizac et du Bengale, par M. Franklin, traduit de l'anglais, 1798, 2 vol.; Voyage pittoresque de l'Inde, par Hodges, traduit de l'anglais. Il a encore publié en 1814 les Voyages de Sindbád le marin, extraits des Mille et une Nuits, dont ils forment l'une des fictions les plus attachantes et les plus merveilleuses. La commission temporaire des arts ayant été dissoute parle gouvernement directorial, et le dépôt des Capucins ayant été disperse dans différens établissemens, M. Langlès n'a plus rempli d'autre fonction que celle de conservateur-administrateur des manuscrits orientaux, et celle de professeur de langues orientales. Au moment de la création de l'institut, M. Langlès fut appelé par les vœux du premier tiers dans les deux autres tiers. Cette société savante s'étant occupée de remettre en activite tous les travaux entrepris par les académies auxquelles elle succédait, M. Langlès fut nommé membre de la commission des travaux littéraires, pour la quelle il a rédigé plusieurs notices de ma

nuscrits, et des mémoires qui sont insérés dans la collection de la classe de litté rature et beaux-arts de l'institut. Il tenta aussi, en 1796, avec MM. Camus, Daunou et Baudin des Ardennes, de ressusciter le Journal des savans, qui ne subsista que six mois entre leurs mains. Nous nous contenterons de citer celles de ses nombreuses Dissertations ou Notices, insérées dans le Magasin encyclopédique, qui concernent les Travaux littéraires et typographiques des Anglais dans l'Inde, ainsi que la traduction et les notes du Catalogue des manuscrits samskrits dela bibliothèque du roi, composé en anglais par M. Alexandre Hamilton. Ce célèbre orientaliste a enrichi de notes très-intéressantes la traduction française des deux premiers volumes des Recherches asiatiques, imprimées à l'imprimerie royale ; entreprise importante, dans laquelle il a été efficacement secondé par MM. Delambre, Cuvier, Olivier et Lamarck. Obligé d'abandonner une opération si conforme à ses goûts, M. Langlès céda aux sollicitations d'un libraire, qui le pria de diriger une nouvelle édition des Voyages de Chardin en Perse. On se formera une idée des soins et du travail qu'il a consacrés à cette édition, quand on saura qu'il y a répandu plus de deux mille notes et que près de la moitié du dixième volume est remplie par une Notice chronologique de la Perse, depuis les temps les plus reculés, jusqu'en 1806. C'est la première histoire suivie de ce vaste empire qui ait été composée jusqu'à l'ap-parition du grand ouvrage du général Malcolm. L'espèce de commentaire suivi que M. Langlès a ajouté aux dissertations des savans anglais de Calcutta dans les deux volumes de la traduction française des Recherches asiatiques, a été pour lui une suite d'études préparatoires pour la composition du grand ouvrage qu'il publie maintenant sur les Monumens anciens et modernes de l'Hindoustan, dont douze livraisons ont déjà paru. Outre les manuscrits orientaux de la bibliothèque du roi, que M. Langlès a à sa disposition, et dont il fait part avec empressement à tous les savans qui viennent la visiter, il possède la collection de livres orientaux, ou relatifs à l'Orient, imprimés tant en Europe qu'en Asie, la plus complète peut-être qui existe sur le continent. Nous ajouterons aux ouvrages

de ce savant distingué, que nous avons deja cités: l'orage du Bengale à Pétersbourg, par G. Forster, traduit de l'anglais, Paris, 1802, 3 vol. in-8.; Voyage de F. Hornemann dans l'Afrique septentrionale, traduit de l'anglais, avec des Notes de M. Langlès, Paris, 1803, 2 vol. in-8.; Notice sur les travaux des missionnaires dans l'Inde, 1817, in-8.; extrait des Annales encyclopédiques. M. Langlès a coopéré à la rédaction de différens journaux littéraires, et il a composé, pour la Biographie universelle, un grand nombre d'articles. M. Langlès est chevalier de l'ordre de St-Wladimir de Russie. En 1817, la Société Asiatique de Calcutta l'a reçu au nombre de ses membres honoraires.

LANGLOIS (ISIDORE), littérateur et journaliste, né à Rouen le 18 juin 1770, d'une famille estimée, fit de bonnes etudes et vint ensuite se fixer à Paris. Ilembrassa avec une excessive chaleur la cause de la révolution, et quoique doué de la plus frêle constitution, on le voyait, avant le 10 août 1792, dans tous les groupes factieux, appelant par ses vœux, ses conseils et ses discours, le renversement de la monarchie. Il marcha contre le château des Tuileries dans cette funeste journée; mais ses principes politiques changèrent peu de temps après la mort de Louis XVI, et il se déclara contre la Montagne, au 31 mai. Devenu président de la section de Bon-Conseil, à l'époque du 13 vendémiaire, il se montra l'un des plus fougueux ennemis de la convention, fut arrêté, mis en jugement, et acquitté, malgré les preuves multipliées de sa rébellion; ce qui prouva jusqu'à l'évidence que le systême de la convention n'était pas de faire des exemples sanglans. Il rédigea, depuis, le journal ayant pour titre le Messager du soir, dans lequel il attaqua, avec autant d'obstination que de maladresse, les hommes de la révolution, auxquels il n'était pas difficile de retorquer contre luimême les argumens que leur portait leur imprudent accusateur. Langlois ne fut pas heureux dans une de ses indiscrètes aggres sions contre le général Hoche, qui pensa le faire périr sous le bâton. Proscrit comme journaliste, au 18 fructidor, et frappé de déportation, il sut se soustraire d'abord aux poursuites dirigées contre lui; fut ar rêté en frimaire an 6 (1798), enfermé au Temple, et envoyé à Oléron. Rappelé par

les consuls après le 18 brumaire, il mou rut à Paris le 12 août 1800. Langlois n'était pas un méchant homme, quoique ses premiers pas dans la révolution préviennent peu favorablement en sa faveur. Il etait très-instruit, ardent, laborieux et plein de courage; mais faible, bilieux et valetudinaire. Son style acre et mordant lui fit un grand nombre d'ennemis, et fut presque toujours la cause des proscriptions qu'il eut à souffrir.

LANGSDORFF (GEORGE H. DE), fils aîné du vice-chancelier de ce nom, au service du grand-duc de Bade, est né en 1774, à Lalsk, dans le cercle de Souabe. Après avoir commencé son éducation à Buchsweiler, il la termina à l'université de Goettingue, où il s'appliqua exclusivement à l'étude de la médecine et de l'histoire naturelle : la botanique et la minéralogie devinrent surtout ses occupations favorites, et il ne tarda pas à y acquérir de grandes connaissances. Ayant pris le degré de docteur, il accompagna, comme médecin, le prince de Waldeck dans son voyage à Lisbonne, et, à la mort de ce prince, il retourna en Allemagne. Il accompagna ensuite le capitaine de Krusenstern dans son voyage autour du monde, et se rendit très-utile au gouvernement russe,en suggérant plusieurs améliorations,pour lesquelles l'empereur Alexandre lui accorda l'ordre de Ste-Anne de seconde classe, le fit conseiller de cou, et le nomma son consul-général à RioJaneiro, où il réside en ce moment. Il a publié : Voyages dans différentes parties du monde pendant les années 1803 à 1817, 2 vol. in-4., avec vingt- une gravures et une carte, Francfort, 1812. Cet ouvrage a été traduit en anglais (voy. KRUSENSTERN). Le premier volume contient un voyage au Brésil, dans la mer du Sud, au Kamschatka et au Japon; le deuxième volume, un voyage aux îles Aleutiennes et sur la côte nord-ouest de l'Amérique, et le retour par terre, par le nord-est de l'Asie, à travers la Sibérie jusqu'à Pétersbourg: cette route n'avait pas encore été suivie.

LANJUINAIS (Le comte JEAN-Denis), né à Rennes, le 12 mars 1753, est l'un des hommes qui, par ses talens, ses principes, son caractère, sa persévérance et son courage, ont le plus honoré et le mieux servi la cause de la liberté. Il était avocat et professeur en droit ecclésiastique à

l'université de Rennes, et l'un des conseils des états de Bretagne, élus par les trois ordres avant la convocation des étatsgénéraux, où il fut député par le tiersétat de la sénéchaussée de Rennes. Dans aucune province française, l'amour de la patrie et la haine des abus n'avaient, plus qu'en Bretagne, exalté les esprits et inspiré un enthousiasme plus général, suite nécessaire des révoltans abus d'autorité, dont cette province avait été le théâtre dans les dernières années du règne de Louis XV; aussi est-il vrai de dire que la révolution était commencée en Bretagne longtemps avant la convocation des états-généraux. Des assemblées de députés des paroisses, connues sous la denomination de Chambres de lecture, avaient, en préparant leurs cahiers, commencé à discuter les priviléges de la noblesse, en matière d'impôts; les partis s'étaient formés, le sang avait coulé, et l'animosité était extrême. La noblesse, forcée de se disperser, n'avait point fait d'élections, et avait protesté contre celles du tiers-état. Le parti populaire, dans lequel M. Lanjuinais figurait en première ligne, n'avait tenu aucun compte de ces protestations, dictées à la noblesse par l'intérêt personnel, dans la seule volonté de retenir des droits oppressifs qu'elle sentait prêts à échapper de ses mains, et qui n'eurent d'autre effet que d'irriter de plus en plus les esprits. Tel était l'état des choses lorsque les députés bretons arrivèrent aux états généraux. En général, cette députation avait un caractère de républicanis me dont il faut chercher le principe dans les statuts particuliers à la Bretagne, et cette disposition eut une grande influence sur les premières délibérations de l'assem blée constituante. A cet esprit, qui était éminemment le sien, M. Lanjuinais joignait des sentimens religieux, des mœurs severes, et une très graude fermeté à suivre les conséquence des principes qu'il avait adoptés. Ses collegues et lui, établi rent à Versailles ce fameux comité breton, qui, transporté un peu plus tard à Paris, dans l'emplacement de l'ancien cou vent des Jacobins, devint la société des amis de la constitution, puis la société populaire, à laquelle s'affilièrent les autres sociétés populaires de la France, et qui finit par exercer sur toute la république une domination exclusive et sanguinaire. Les députés bretons, en formant leur co

mité,n'avaient d'abord que l'intention d'y traiter des intérêts particuliers de leur province; mais lorsqu'ils virent le parti qu'ils pouvaient en tirer pour les inté-rêts généraux de la France et de la liberté, ils s'empressèrent d'y admettre ceux de leurs collègues des autres provinces qui suivaient le même systême. La plupart des députés qui formaient cette réunion, étaient loin de vouloir renverser la monarchie, mais ils voulaient restreindre son pouvoir dans des limites constitutionnelles, et détruire l'arbitraire qui décidait de tous les actes du gouvernement : en un mot amener tous les grands et sages résultats, indiqués par les lumières du siècle, appeles par la raison nationale, et consacrés depuis par la charte, qui est devenue, en 1814, la loi fondamentale de la France. Dès le 27 juin 1789, M. Lanjuinais s'éleva contre les expressions je veux, j'ordonne, dont s'était servi le roi dans la séance du 23. Plus tard on l'entendit parler avec force contre la noblesse de Bretagne, qui ne cessait de publier des protestations contraires aux actes de l'assemblée, et appuyer les mesures qui furent prises contre les parlemens. Doué d'une imagination ardente, par laquelle il se laissait trop souvent dominer, M. Lanjuinais repoussa l'établissement de deux chambres qu'avait proposé le premier comité de constitution, et céda, dans cette circonstance au préjugé populaire, enraciné, à cette époque, dans un trop grand nombre de bons esprits, lesquels dans l'établissement de ce système, voyaient, on pourquoi, le triomphe d'une aristocrație olygarchique, ou une servile imitation des formes du gouvernement anglais. Dans tout le cours de la session de l'assemblée constituante, Lanjuinais opina pour l'anéantissement de tous les privileges; demanda que les gens de couleur fussent admis à l'exercice des droits civils et politiques, et se montra, quoique très-religieux, for tement attaché aux libertés de l'église gallicane, et l'un des adversaires les plus prononcés des prétentions de la cour de Rome. En qualité de membre du comité ecclésiastique, il fut un des députés qui contribuèrent le plus à la constitution civile du clergé, s'efforçant d'en écarter ce qui, dans l'opinion de cet homme respectable, eût pu devenir l'occasion d'un schisme, dont son amour pour la religion ne lui faisait jamais considérer les suites qu'a

ne sait

vec douleur: mais dont les lumières, universellement répandues en France, ne lui permettaient pas de croire qu'elle eût rien, åredouter. Il parla souvent sur cette matière délicate,et y fit toujours preuve d'une profonde érudition. Quoique reformateur de la discipline temporelle de l'église, il ne fut pas du nombre de ceux qui la dépouillèrent de ses biens; il voulut au contraire les lui conserver, en s'opposant à ce qu'ils fussent déclarés nationaux, et en soutenant que les dîmes inféodées venaient, pour la plupart, des dîmes ecclésiastiques, ainsiqu'il s'efforce de le prouver dans son ouvrage Sur l'origine des dimes. Après les événemens des5et6octobre 1789, Mirabeau s'étant rapproché de la cour, et le roi ayant consenti à le nommer l'un de ses ministres, le député de Provence demanda que les ministres fussent admis dans l'assemblée avec voix consultative, sauf à statuer dans la constitution sur laquelle on délibérait, s'ils pourraient en étre membres; cette proposition, vivement débattue, fut sur le point de passer; mais M. Lanjuinais demanda que, pendant la session, aucun député ne pût faire partie du ministère. Cette motion fut décrétée au milieu de ces applaudissemens d'enthousiasme, si communs dans les grandes assemblées, lorsque chacun de leurs membres, mû par un noble sentiment personnel, croit avoir donné à la patrie un gage irrecusable de son désintéressement, et n'a donné, en effet, le plus souvent, que la preuve d'un esprit étroit, irréfléchi, sans profondeur et sans prévoyance dans ses vues, et qui croit l'état sauvé, parce qu'il a acquis, à ses propres yeux, un nouveau degré d'estime pour lui-même. Nous avons déjà démontré dans le cours de cet ouvrage, que les fautes qu'a fait commettre, dans la révolution, ce sentiment si respectable par lui-même, ne peuvent être ni calculées ni réparées. Lorsque les événemens du Champ-de-Mars (17 juillet 1791), eurent ouvert les yeux sur le gouffre profond qui menaçait d'engloutir la monarchie constitutionnelle, et avec elle, tous les amis de la liberté publique, Lanjuinais se réunit aux hommes distingués, connus depuis sous le nom de Réviseurs, et reconnut avec eux, qu'il fallait, par tous les moyens, et autant que cela serait possible dans l'état de désorganisation physique et morale où la France était alors plongée, s'attacher à rendre à l'autorité

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royale la force d'exécution dont on l'avait dépouillée pied à pied, depuis deux ans, et sans laquelle on ne pouvait songer maintenir l'ordre constitutionnel. Après la session, M. Lanjuinais fut nommé mem bre de la haute-cour nationale. En septembre 1792, il fut député à la convention nationale par le département d'Illeet-Vilaine. Plus modéré à mesure que ses funestes pressentimens se réalisaient, et que la révolution s'éloignait davantage de son bût, on le vit, dès les premieres séances de la convention, déployer une énergie que ne pûrent, dans les circonstances les plus terribles, intimider les menaces et les fureurs de l'anarchie, la crainte de la proscription, et l'aspect même de la mort. Le 24 septembre, deux jours seulement après la réunion de la convention, il appuya la proposition faite par Kersaint, de rendre un décret contre les provocateurs à l'assassinat. En octobre, il devint l'objet des insultes journalières de la feuille abjecte et sanguinaire de Marat, pour avoir demandé qu'une garde départementale assurat l'indépendance de la convention. Le 5 novembre, il unit sa voix éloquente à celle de Louvet qui, dans la séance du 29 octobre précédent, avait porté à la tribune nationale une dé nonciation effrayante de faits contre Robespierre, dont les projets de dictature étaient mis à découvert. La convention, voulant se montrer supérieure à ses dangers, crut ne devoir donner aucune suite aux accusations de Louvet et de Lanjuinais, et de l'impunité accordée à Robespierre, dans les deux funestes journées du 29 octobre et du 5 novembre, résultèrent pour la république, la catastrophe sanglante du 21 janvier 1793: celle du 31 mai suivant: l'établissement de la tyrannie décemvirale et tous les forfaits de la terreur. Le 15 décembre, dans l'opinion qu'il émit relativement au procès du roi, Lanjuinais, avec une force de raison, de justice, et de vérité qu'il n'appartenait qu'à l'esprit de faction de méconnaître, demanda qu'on laissât au moins, à ce prince, les mêmes moy ens de défense etd’appel qu'aux autres accusés. Nous regrettons, qu'avec plusieurs de ses respectables collègues, M. Lanjuinais ait cru à la prétendue existence d'une faction d'Orléans; (*)

(*) Comme theorie, nul doute que d'excellentes têtes n'aient eu l'idée de

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nous regrettons davantage qu'ayant embrassé cette idée, il ait mis tant de soin à la combattre. Nous avouerons cependant que cette erreur n'était pas sans excuse, si l'on considère quels étaient les hommes qu'on regardait, à cette époque, comme les complices de cette faction, et combien peu quelques uns d'entr'eux devaient inspirer de confiance et de respect. Le 26 décembre, Lanjuinais osa attaquer l'acte même d'accusation deLouisXVI.Iné branlable à la tribune, il y développa, au milieu des clameurs, toute l'irrégularité d'une procédure, dans laquelle, violant les dispositions formelles de l'acte constitutionnel de 1792, et au mépris des formes protectricesdela jurisprudence criminelle, les ennemis déclarés de Louis devenaient à-la-fois accusateurs, témoins, jurés et juges. Enfin, il porta l'énergie jusqu'à qualifier quelques-uns de ses collègues du nom de conspirateurs.et à les sommer d'annuler l'acte d'accusation. A l'appel nominal du 15 janvier 1793, il prononça que Louis XVI était coupable, sans consentir néanmoins à se reconnaître pour son juge; et, le 16, il vota sa réclusion et son bannissement à la paix, demandant au reste que, quel que fût le jugement qu'on allait porter, il ne pût avoir force de loi que s'il réunissait les deux tiers des suffrages. Cette opinion, rejetée d'abord par l'assemblée, fut ensuite reproduite par les défenseurs de Louis. Au moment d'être accueillie par l'assemblée, encore indécise, mais qui penchait à l'adopter, un membre crut devoir la combattre de nouveau, et le funeste talent qu'il développa pour soutenir son opinion, détermina l'assemblée à passer à l'ordre du jour. Le 8 février, M. Lanjuinais, environné d'hommes menaçans, armés de poignards et de pistolets, soutint avec chaleur le décret qui ordonnait la poursuite des auteurs des massacres de septembre 1792, décret que les dominateurs voulaient faire rapporter. Au commencement de mars, il combattit le projet d'établir un tribunal extraordinaire et demanda que du moins ses attributions ne s'étendissent pas, au-delà de

terminer la révolution de la seule manière possible; c'est-à-dire, par un changement de dynastie; comme parti organisé, actif et puissant, nous soutenons que ce qu'on appelle, depuis trente ans, faction d'Orléans n'a jamais existé.

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il s'écria:

Paris. Sommé de se rendre au comité de législation pour coopérer à la rédaction de la loi, il refusa hautement, s'abstint de ce travail, et ne cessa de voter contre le projet. Les 27 et 28 mai, il atattaqua de nouveau, et avec un courage qui semblait s'accroître avec l'imminence des dangers, la faction de la commune usurpatrice et ses auxiliaires de la montagne, qui demandaient la dissolution de la commission des douze, l'arrestation et la mise en jugement de ses membres. Le 30, il dénonça Chabot comme l'un des chefs du complot que l'on formait contre une partie des députés. Le 2 juin, il parla sur le même objet avec la plus grande énergie, malgré les injures de Drouet et la fureur de Legendre, qui lutta longtemps avec lui en lui tenant le poignard sur la gorge, pour le précipiter de la tribune. C'est dans ce moment que, placé par son indignation même, audessus de toute crainte, et entendant l'infâme Chabot insulter Barbaroux qui annonçait sa soumission «Les anciens, quand ils préparaient un sacrifice, couronnaient la victime de fleurs et de bandelettes, et vous, plus cruels, vous frappez de coups honteux, vous outragez la victime qui ne fait nul effort pour se dérober au couteau. » L'effet de ces paroles, dont l'éloquence s'élève au sublime dans la situation où elles furent prononcées, fut de réduire, pour un moment les bourreaux au silence; ils entendirent, sans oser l'interrompre, celui-là même qu'ils s'apprêtaient à frapper, les menacer des suites épouvantables de leur triomphe; de leurs prochaines discordes; de l'horreur qui allait s'attacher à leurs noms; et du plus grand des malheurs, celui d'avoir fait un tel pacte avec le crime, que le crime désormais les retiendrait malgré eux. Barère ayant invité alors les députés portés sur les listes de proscription à se suspendre eux-mêmes de leurs fonctions, pour leur propre sûreté, Lanjuinais répondit par un assez long discours qu'il termina par ces paroles, prononcées avec le plus admirable sang - froid : «Si j'ai montré jusqu'à présent quelque courage, je l'ai puisé dans mon ardent amour pour la patrie et pour la liberté. Je serai fidèle à ces sentimens, je l'espère, jusqu'au dernier souffle. Ainsi n'attendez pas de suspension. Je ne puis pas me démettre, car je ne suis pas li

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