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APPENDIX.

No. I.

JONESIUS REVICZKIO, S.

QUAM jucunda mihi fuit illa semihora, quâ tecum de poetis Persicis meis tuisque deliciis sum collocutus. Initium enim amicitiæ et dulcissimæ inter nos consuetudinis arbitrabar fuisse. Quam spem utriusque nostri importuna negotia fefellerunt. Ruri enim diutiùs quam vellem commorari, variæ me cogunt occupationes. Tu Germaniam ut audivi quam citissimè proficisci meditaris. Doleo itaque amicitiam nostram in ipso flore quasi decidere. Illud tamen tanquam lenimen doloris mei restat, nempe ut si præsens te præsentem alloqui non possim, liceat certè quidem per literas colloqui, et cùm sermonis communicatione, tùm conjunctione studiorum, perfrui. At cùm de amicitiâ nostrâ loquar, ne quæso videar hoc tam gravi nomine abuti. Permagno enim vinculo conjungi solent ii qui iisdem utuntur studiis, qui literas humaniores colunt, qui in iisdem curis et cogitationibus evigilant. Studia eadem sequimur, eadem colimus et consectamur. Hoc tamen inter nos interest. Nempe tu in literis Asiaticis es quàm doctissimus; ego verò ut in iis doctus sim, nitor, contendo, elaboro. In harum literarum amore non patiar ut me vincas, ita enim incredibiliter illis delector, nihil ut suprà possit: equidem poesi Græcorum jam inde à puero ita delectabar, ut nihil mihi Pindari carminibus elatius, nihil Anacreonte dulcius,' nihil Sapphûs, Archilochi, Alcæi, ac Simonidis aureis illis reliquiis politius aut nitidius esse videretur. At cum poesim. Arabicam et Persicam degustarem, illicò exarescere.

*

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MONSIEUR,

No. II.

REVICZKI à MoNs. JONES.

Je suis très sensible à votre souvenir et aux compliments réitérés, dans vos lettres à Madame de Vaucluse; je puis dire que j'en suis un peu fier, me glorifiant, de ce qu'une entrevue d'un quart-d'heure m'a pu procurer l'honneur de votre amitié. Je tâcherois bien de la cultiver, si mon plan me permettoit de faire un plus long séjour dans ce pays-ci, ou du moins, si je pouvois vous recontrer à Oxford, où je pense de me rendre avant que je quitte l'Angleterre. J'apprens, avec plaisir, que vous avez été chargé de donner au public, un Essai sur la Prosodie des Orienteaux: comme je suis persuadé que vous Vous acquitterez dignement de cette commission, et qu'un bon succès couronnera votre entreprise, je suis charmé d'avance, de l'humiliation que vous ferez essuyer à tous nos Poëtes Européens qui ne pourront pas s'empêcher d'avoir honte de la pauvreté de leurs langues prosaiques, lorsqu'ils s'apperceveront que les langues Orientales, independamment de la rime, que est de leur invention, ont de véritables quantités de syllabes aussi bien que les Grecs, avec une variété de pieds plus abondantes encore, et par conséquent un vrai art métrique et prosodique. Je prends la liberté de vous envoyer le cahier d'une de mes dernières traductions de Hafyz, dont je m'amuse quelquefois quand j'ai du loisir. Vous qui connoissez le génie de la langue Persanne, trouverez sans doute mon entreprise téméraire, aussi ne cherche-je point à faire sentir la beauté de l'original dans ma version, mais uniquement les pensées simples et sans ornement. J'y joins aussi une paraphrase en vers, mais très libre. En quoi je me suis le plus éloigné du texte, c'est en substituant quelquefois au mignon une maitresse; soit pour donner une liaison aux vers, qui, par la nature même du ghazel, n'en ont point; soit pour me conformer en cela au gout de nos pays; d'autant plus que, dans le premier vers, le Persan lui-même parle de sa maîtresse. Vous trouverez aussi, à côté du texte Persan, des expressions analogues des poëtes Grecs et Latins, suivant que je m'en

souviens lorsque je lis Hafyz. J'espère d'avoir l'honneur de vous voir ici avant mon départ, vous assurant que je compte parmi les plus grands avantages que j'ai eu en Angleterre, l'honneur de votre connoissance.

Je suis votre très humble serviteur,

No. III.

REVICZKI.

MONSIEUR,

REVICZKI à MONS. JONES.

Londres, le 24cme de Fevrier, 1768.

Le jour même que j'ai expédié la mienne, j'ai reçu votre savante et obligeante lettre, que j'ai lû avec un plaisir infini, quoique j'aurois souhaité qu'elle fût un peu moins flatteuse sur mon compte, et moins modeste sur le votre. Toutefois je ne prends pas vos expressions à la lettre, et malgré tout ce que vous puissiez dire, je vois clairement par votre goût et jugement sur les passages cités dans votre lettre que vous avez fait un grand chemin dans la littérature Orientale. Je vous prie, cependant, quelque grace pour le Grec et le Latin; car, quoique je ne puisse pas nier qu'il y a quelque genre de poësie, où les Orienteaux, et particulièrement les Persans, ont atteint un degré de perfection et de supériorité, je ne me ferois point de scrupule de renoncer plutôt à la connoissance de ces trois langues qu'à la seule langue Grecque. Je suis bien aise que votre ouvrage soit déjà si avancé, et que je puisse esperer de la voir bientôt rendu public. Je serois fort embarrassé de vous donner quelque avis au sujet de votre livre, à cause que je suis actuellement depourvu de tout livre qui traite directement de cette matière, et que d'ailleurs, c'est une mer à boire, que l'abondance et la variété du metre Oriental, et qu'il est impossible d'en savoir par cœur toutes les parties. Je serois curieux de savoir, sous quel chapitre vous avez rangé le Kaside, genre de poësie très en vogue parmi les Arabes, et cultivé avec grand succès, que répond plus qu'aucun autre à l'élégie Latine, mais qui par sa construction tient au Ghazel, avec cette différence, que le Ghazel, suivant les règles, ne devroit jamais passer 13 distiques ou beits; et que le Kaside n'est borné à aucun nombre: 2do. que les beits du

Ghazel doivent par leur nature comprendre en eux-mêmes et terminer tout le sens, pendant que ceux du Kaside ont du rapport entre eux, en continuant le même sujet.*

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Pour ce qui regarde vos doutes sur la prétendue allégorie de Haf z, il y auroit beaucoup à dire, car il semble que le respect et la vénération que les Mahometans portent à la mémoire de ce grand génie est la véritable cause de leur mystérieuse interpretation; voulant par- justifier la conduite du po te en nous le donnant pour un homme irréprochable aussi bien dans ses mœurs que dans ses vers. La plus grande partie de ses commentateurs, comme Shemy, Surury, et les autres, s'évertuent d'expliquer dans un sens mystique les vers qui roulent sur le vin, les garçons, les plaisirs, et le mépris de la religion, comme indigne d'un bon Musulman; mais le plus habile de ces interprètes, le savant Sadi, n'a pas voulu suivre cette méthode, disant, que quelque raison que puissent avoir les autres commentateurs, sans combattre leur bonnes intentions, il se contentera d'expliquer le texte littéralement. Il ne sera pas, peut-tre, mal-à-propos de marquer ici une anecdote, que j'ai lu quelque-part, touchant Hafyz. Ce grand homme étant mort, quelques uns des Ulemas ont fait difficulté de lui accorder la sepulture, à cause du libertinage de ses poësies; mais enfin, après bien de contestations, ils en sont venu au Tefal, c'est--dire à la pratique, d'ouvrir son Divan au hazard, moyennant une aiguille: le premier vers qui s'offrit a leur vûe fut le suivant:†

Ce passage ayant été pris pour une décision du ciel, les Ulemas furent bientôt d'accord, et on le fit enterrer dans l'endroit même du Musella, devenu célèbre par ses vers. Si je ne me trompe pas, cette circonstance se trouve dans Katib Celebi. Quant à moi, tout autant que je suis porté à croire que Hafyz, en par

* In these letters the reader will find some passages omitted, from the impossibility of procuring types for the Oriental languages.

† In page 49 is a translation of the verse here omitted for the above reason.

lant de vin et de l'amour, n'entend point finesse en cela, de même je dois avouer que je ne trouve point des obscénités en lui, ni des expressions sales et grossières, comme cela arrive assez souvent à Sadi. Je ne puis m'empêcher non plus de le regarder comme un esprit fort; et je pourrois citer cent examples, pour montrer qu'il se moque du prophète et de l'alcoran, comme quand il dit :*

Pour les poëtes Turcs, j'avoue que je ne les lis pas avec le même plaisir, quoique je convienne qu'il y en a quelques uns qui ont du mérite: le plus agréable, à mon avis, est Ruhi Bagdady, dont il y a des satires admirables. Je ne sais pas s'il est de votre connoissance. Mais la plupart des Turcs ne sont que des copistes ou traducteurs des Persans, et souvent destitués de goût et d'harmonie.

Je ne puis pas deviner la raison qui vous fait trouver, Monsieur, un sens impudique dans ce beau vers de Mesihi;

dont le simple sens est: "Mon dieu, ne m'envoyez pas au tombeau sans que j'aie auparavant embrassé mon ami,” à moins que vous ne fassiez consister l'obscénité dans l'amitié d'un garçon, qui est l'éternel sujet de toutes les poësies Orientales, aussi bien que Grecques et quelquefois Latines. Je vous envoye la plus fraiche de mes traductions, en vous priant de me la renvoyer quand vous en serez las, car je n'en ai point de copie. Je suis, avec la plus parfaite estime et vénération, Votre très humble serviteur,

No. IV.

REVICZKI.

REVICZKIUS JONESIO, S.

Londini, Martii die 7, 1768.

Dicamne me literis tuis delectatum, an eruditum ; prorsus animi pendeo, tu in literis omne punctum tulisse

• See page 50.

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