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étranger seulement aux affaires publiques, il ne voit qu'un petit nombre d'amis qui lui sont restés fidèles; il ne regrette probablement, au milieu d'eux, ni la foule qui a déserté ses antichambres pour se précipiter dans d'autres salons, ni tant de flatteurs qui depuis se sont faits ses détracteurs. CAMBACÉRÉS (ÉTIENNE-HUBERT), frère du précédent, né à Montpellier le 11 septembre 1756. En sa qualité de cadet d'une famille qui commençait à s'élever, il embrassa l'état ecclésiastique, devint chanoine, et cultiva les lettres avec beaucoup de succès. Il ne prit aucune part active à la révolution; mais à l'élévation de son frère, il s'occupa de son avancement. Il aimait le faste et les cérémonies, et il se persuada, avec raison, qu'il avait assez de mérite pour parvenir aux plus éminentes dignités du clergé. Il fut nommé à l'archevêché de Rouen le 11 avril 1802; cardinal, l'année suivante; grand-aigle de la légion-d'honneur, et sénateur le 1 février 1805. La mémorable

bataille d'Austerlitz lui fournit l'occasion de déployer dans un mandement, écrit avec éloquence et pureté, tout ce que le patriotisme et la religion pouvaient inspirer de plus sublime en faveur du chef du gouvernement auquel il était attaché. Le 8 avril 1814, il envoya son adhésion aux actes du sénat qui prononçaient la déchéance de Napoléon; ce qui n'empêcha point l'empereur de le nommer, le 2 juin suivant, membre de la chambre des pairs, dont il cessa de faire partie au retour du roi. Dans la tournée que le duc d'An

goulême fit, en 1817, l'archevêque de Rouen fut très-bien accueilli de ce prince, à son passage dans cette ville; il a conservé tous ses honneurs et ses dignités jusqu'à la fin de sa vie, et il est mort le 25 octobre 1818, justement regretté de ses amis et de ses diocésains.

CAMBACÉRÈS (le général), est frère cadet des précédens. Áprès avoir été colonel d'un régiment de chasseurs, il fut nommé général de brigade le 10 juillet 1806, et n'a plus eu d'avancement, malgré la puissante protection de ses frères. Il jouit aujourd'hui de la demi-solde.

CAMBACERES (L'ABBÉ DE), né à Montpellier, en 1721; archidiacre de l'église de cette ville. L'éloquence et les belles-lettres furent ses études favorites, et Bossuet et Bourdaloue ses auteurs d'affection. Lorsqu'il se fut pénétré de leurs ouvrages, il parut en chaire, et prononça avec succès le panégyrique de saint Louis, en présence de l'académie française. Il prêcha devant Louis XV, en 1757; et par son courage à retracer les désordres publics et les progrès de l'irréligion, il étonna le roi et fit trembler les courtisans. Il méprisa les faveurs de la cour, vécut d'une manière modeste des revenus de son archidiaconnat, et mourut en septembre 1802. Il était oncle des précédens.

CAMBE, avocat à Rhodez avant la révolution, montra ensuite, dans l'exercice de diverses fonctions, beaucoup de dévouement à la cause nationale. En 1799, il fut nommé au conseil des cinq-cents

par le département de l'Aveyron, il s'y réunit à la majorité; il vota pour la liberté des cultes, et il demanda que le directoire garantît le maintien des institutions républicaines. Au mois de juillet de la même année, il s'éleva contre le système des otages, insistant pour que la responsabilité pesât, non sur les personnes, mais sur les communes. Il combattit, au tribunat dont il fit partie dès sa formation, le projet de réduire le nombre des justices de paix. Ayant été compris dans la série des membres qui sortirent, en 1802, il cessa de paraître dans les assemblées législatives.

CAMBIS (JOSEPH DE), chevalier des ordres de Saint-Louis, SaintLazare, et de Cincinnatus, est né en Provence, dans la petite ville d'Entrevaux, où son père gouvernait pour le roi. Destiné de bonne heure au service de la marine royale, il fut d'abord garde de la marine, à Toulon; et ses chefs distinguèrent bientôt en lui plusieurs qualités, qui lui valurent un avancement rapide. Il fit, pendant la guerre d'Amérique, les campagnes de 1778 à 1782, et contribua, par son intelligence et son courage, à la prise de Savanah, par le comte d'Estaing. En 1792, il commandait le Jupiter, vaisseau de la station de SaintDomingue; il y calma, par sa fermeté et son sang-froid, une insurrection de l'équipage, qui s'annonçait avec beaucoup de violence. S'étant trouvé depuis, à NewYork, dans une circonstance semblable, il ne fut pas aussi heureux, et reçut même une blessure en voulant faire rentrer les mutins

dans le devoir. M. de Cambis revint en France en 1793. Ses opinions politiques parurent suspectes au gouvernement d'alors, qui le fit arrêter et conduire à Paris, où il demeura privé de sa liberté jusqu'à la chute de Robespierre. Il n'eut point d'emploi sous le gouvernement du directoire; mais après la révolution du 18 brumaire, il fut chargé de l'inspection des classes des quatrième et cinquième arrondissemens maritimes. Malgré les avantages que promettaient ses travaux, nouvelle organisation ordonnée par le premier consul, vint en détruire le fruit. Depuis cette épo

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que, M. de Cambis a vécu tranquille au sein de sa famille.

CAMBOIRE (N.), député à la convention nationale, par le département de la Dordogne, était administrateur du district de Périgueux. Il vota la mort de Louis XVI, et fut, après la session, commissaire du directoire.

CAMBON (JEAN-LOUIS-AUGUSTEEMMANUEL DE), naquit à Toulouse, en 1737. Tous ses parens avaient suivi la carrière de la magistrature, il dut les imiter; et après avoir fait, avec succès, son cours de droit, il fut reçu conseiller au parlement de Toulouse, en 1758. Il devint avocat-général en 1761, et remplit ces fonctions avec talent et sagacité; il signala ses opinions tolérantes dans l'affaire d'Etienne Sales, où des catholiques disputaient à un protestant la validité du mariage de son père. Cambon porta la parole; il développa, d'une manière lumineuse, les principes des lois naturelles et des lois civiles, et dépouilla les

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édits de la sévère interprétation de l'esprit de parti. Il ne faut pas se demander, dit-il, si l'on est persuadé de l'existence du mariage contesté: mais il faut se demander si l'intérêt public n'exige pas qu'on le présume; et puisque le contraire n'est pas juridiquement prouvé, la justice et l'équité · veulent qu'on suppose tout ce qui est naturellement possible, plutôt que de faire perdre à un enfant, P'état dont il a légitimement joui. Les conclusions de Cambon furent suivies; on les adopta dans tous les tribunaux du royaume, et le sort de 400,000 familles protestantes demeura fixé désormais. En 1763, l'Académie des jeux floraux appela Cambon dans son sein; là, on entendit avec plaisir le jeune mainteneur se montrer toujours éloquent dans ses discours, dans les semonces qu'il prononçait, où l'élégance le disputait à la pureté du goût. Durant les querelles des parlemens avec le chancelier Maupeou, en 1771, Cambon allié avec ce dernier, trouva le moyen, en soutenant la cause de ses confrères, de ne pas se brouiller avec la cour. On l'accusa même de suivre le vent, ce n'était pas la coutume d'alors. En 1779, il acquit une charge de président à Mortier, et en 1786, il devint procureur-général, après la mort de M. Le Comte. Lors de la convocation de l'assemblée des notables, en 1787, Cambon fit partie de cette réunion; Louis XVI put apprécier la sagesse de ses opinions, et une fermeté qu'il savait modérer suivant les circonstances. Le roi voulut utiliser de pareilles vertus; il nomma Cambon

premier président du parlement de Toulouse. A peine celui-ci avait-il pris possession de sa nouvelle dignité, qu'il fut appelé, en 1788, à la seconde assemblée des notables. Cambon la quitta, et revint à Toulouse, pour se consacrer tout entier aux devoirs de son rang. Mais la révolution mit obstacle aux projets qu'il avait formés pour le bien. Proscrit, ainsi que toute sa compagnie, la fuite le sauva de l'échafaud. Il fallait aux terroristes une victime de son nom; et sa femme, modèle de toutes les vertus, tomba sous la hache fatale, le 8 thermidor, la veille du jour où la France fut délivrée de ses tyrans. Cambon, rendu à sa patrie, lorsque le premier consul eut ramené, parmi nous, l'honneur et la paix, retrouva presque toute sa fortune, et termina sa vie au milieu de sa famille et de ses amis, en septembre 1807. Il laissa trois enfans; le marquis Auguste de Cambon, Alexandre de Cambon, président à la cour royale de Toulouse, et une fille, mariée au président Félix d'Aiguevives.

CAMBON (JOSEPH). C'est surtout de l'homme public que le biographe doit compte à la postérité; commençons donc par la vie politique de cet homme célèbre, où nous aurons plus d'un reproche grave à mêler aux éloges que la justice la plus sévère doit lui rendre; nous le montrerons ensuite dans la vie privée, où nulle accusation ne saurait l'atteindre. Joseph Cambon naquit à Montpellier, en 1754, d'une famille estimable de négocians: il était chef de la maison de com

merce paternelle, en société avec deux de ses frères, lorsque la révolution éclata. Il en adopta les principes et les opinions qu'il avait manifestées dès son plus jeune âge, avec toute la chaleur d'une tête méridionale; et dans cette grande commotion de tous les intérêts politiques, il se trouva successivement porté, par le département de l'Hérault, à l'assemblée législative et à la convention nationale. Il y fut chargé pendant cinq ans de l'administration générale des finances de la république; et lorsqu'il quitta les et lorsqu'il quitta les affaires de l'état pour reprendre les siennes, sa fortune et celle de ses frères, loin d'avoir reçu aucun accroissement, se trouvait sensiblement diminuée; cet exemple est de ceux que l'on cite sans craindre de se répéter. La créa tion du grand-livre de la dette publique, la forme qu'il reçut alors, et qu'il a conservée depuis, est un service immense rendu à l'état, et compensera peut être, aux yeux de la postérité, des erreurs funestes auxquelles nous ne voulons pas même chercher d'excuses dans les passions, ni dans les intérêts de cette terrible époque. Au sein d'une assemblée populaire, qu'une seule ame ardente et furieuse semblait animer, Cambon parla comme la grande majorité de ses collègues contre les prêtres réfractaires et contre les émigrés; mais sans jamais étendre au-delà des limites légales, l'avis le plus sévère qu'il se permit d'ouvrir. Son rapport du 3 avril 1792, sur la situation des finances, est mis par les hommes d'état fort au-dessus de ce

compte rendu, qui commença la réputation de M. Necker. Plusieurs parties de ce rapport ne font pas moins d'honneur au caractère de Cambon qu'à ses talens: On n'oubliera, disait-il, dans le compte que l'on va faire rendre à tous ceux qui ont_manié les deniers publics, ni les hommes à grandes moustaches et à bonnet rouge qui ont levé des taxes révolutionnaires dans les départe¬ mens, ni ceux qui, sous prétexte de détruire le fanatisme, s'en sont approprié les dépouilles. Cambon demanda la fonte des statues royales, et cependant il ne craignit pas de défendre l'autorité du monarque à la tribune de l'assemblée législative, et après le 10 août, d'indiquer des mesures à prendre dans l'intérêt de la sûreté du prince. Dernier président de l'assemblée législative, ce fut lui qui présenta les pièces trouvées dans l'armoire de fer, et qui provoqua la vente des bijoux de la couronne. Membre de la convention, il dénonça Marat et la commune de Paris; il accusa les dépositaires des biens d'émigrés, fit astreindre les ministres à rendre compte de leurs dépenses secrètes, leva un impôt sur les recettes, et se prononça énergiquement contre la dictature de Robespierre. On le vit dénoncer plusieurs ministres, faire décréter que le pouvoir des généraux en pays étranger connaîtrait désormais des bornes; demander l'ostracisme contre les ennemis de la république, et voter, sans appel au peuple, la mort de l'infortuné Louis XVI: il s'éleva contre l'organisation du tribunal révolutionnaire, et nom

mé membre du comité de salut public, il fit porter sur les finances plusieurs décrets d'une influence heureuse, et s'opposa de tous ses moyens, à la tyrannie toujours croissante de Robespierre, qui n'osa l'attaquer que le 8 thermidor, la veille de sa propre chute. Après ce grand événement, Cam bon eut à lutter et contre les partisans du système nouveau, et contre les débris que l'on appelait la queue du gouvernement de Robespierre. On a remarqué avec raison que Cambon, presque modéré en 1793, se jeta dans les rangs des démagogues en 1795: en effet, lorsqu'on se souvient que le 19 mai 1793, il s'éleva courageusement contre les pétitionnaires qui demandaient la mise en jugement des girondins; que le 2 juin, dans l'espèce de procession que fit la convention entière, dans le jardin des Tuileries, pour donner une preuve de la liberté dont elle jouissait; quand on le voit, disons-nous, se placer au milieu des députés dont les factions de la commune et des jacobins demandaient la tête, on a peine à s'expliquer que le même homme ait pris part aux mouvemens séditieux du 12 germinal an 3, à la suite desquels il fut décrété d'arrestation sur la proposition de Tallien. Il parvint à se soustraire par la fuite, à l'exécution de cet ordre, et par conséquent à la mort qui plana pendant plusieurs mois sur sa tête, L'amnistie du 4 brumaire an 4 le rendit à la vie et à la liberté; il sortit de sa retraite pour se rendre à Montpellier; il y vécut ignoré, laborieux et tranquille, jusqu'en 1815, où il fut nommé

T. IV.

membre de la chambre des représentans il montra beaucoup de modération dans cette assemblée, et ne prit part qu'aux discussions relatives aux réquisitions de guerre et au budjet. Contraint à quitter la France en vertu de la loi d'amnistie, du 12 janvier 1816, Cambon se rendit dans le royaume des Pays-Bas et mourut à Bruxelles, en 1820, après 4 ans d'un exil qu'ilsupporta avec autant de dignité que de courage. Cet homme, si digne de blâme dans quelques actions de sa vie politique, n'était ni sans vertu, ni même sans titres à la reconnaissance de ses concitoyens. Sa loyauté, son extrême désintéressement, ne sont point contestés. Sa fortune, restée au-dessous de ce qu'on est convenu d'appeler l'aisance, était encore au-dessus des besoins de Cambon, puisqu'il y trouva jusqu'au dernier moment, les moyens de soulager l'infortune. Un de ses compagnons d'exil lui doit de n'avoir pas péri de faim et de misère sur la terre étrangère, et de s'y trouver à l'abri de cette crainte, après la mort de son ami, qui a pourvu, par ses dernières dispositions, à ce que cet infortuné reçût les secours qu'il lui avait fournis pendant sa vie. Le département de l'Héraut lui doit de n'avoir pas été compris dans les attributions d'un féroce proconsul nommé Laborie, qui avait été envoyé dans les départemens méridionaux pour y poursuivre les fédéralistes, et qui, après avoir porté la terreur et la dévastation dans le département du Gard, venait de recevoir des comités l'ordre de se transporter à Montpellier. Des

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