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démission de l'archevêché de Malines; mais il lui refusa la permission de se retirer, par des motifs qui prouvaient l'estime et la confiance qu'il avait pour son ministre. Granvelle mourut à Madrid le 21 septembre 1586, et son corps fut transporté à Besançon. Le cardinal de Granvelle était un homme d'un grand sens, d'un esprit aussi pénétrant que solide, qui avait des vues sûres et étendues, autant de fermeté que de prudence. Il était d'un caractère complaisant, sans flatterie, sensible aux injustices, et les sachant dissimuler, mais sans trahison; fidèle aux devoirs de l'amitié, bon par tempérament et par principes, sévère par zèle pour l'ordre et la justice, attaché à sa religion et à son roi. Nous avons des Mémoires pour servir à l'Histoire du cardinal de Granvelle, publiés à Paris en 1753, en 2 vol. in-12, par dom Prosper Lévesque, bénédictin de la congrégation de S.-Vannes, à qui l'abbé Boisot de Franche-Comté avait légué les monuments qu'il avait rassemblés par des recherches très laborieuses, de même que ses propres manuscrits, qui contenaient entre autres choses un projet de la Vie du cardinal de Granvelle, qui n'a pas peu servi au R.P. bénédictin. M. Luc Denans de Courchetet a donné une

Histoire de ce cardinal, Paris, 1761, 2 vol. in-12; Bruxelles, 1784. Granvelle est peint avec vérité dans un manuscrit précieux, intitulé: De la guerre civile des Pays-Bas depuis 1556 jusqu'en 1567. Ce manuscrit, qu'on souhaiterait de voir imprimé, se trouve dans le Catalogue des livres délaissés par l'abbé Charles Michiels, et vendus à Anvers le 10 septembre 1781,

n° 335. L'auteur, contemporain des événements qu'il rapporte, nous apprend touchant Granvelle bien des particularités qu'on ne trouve pas ailleurs, et défend sa mémoire contre les calomnies dont le prince d'Orange et ses partisans l'ont noircie.

PERRIER (François), peintre et graveur, né à Saint-Jean-deLône, l'an 1590, quitta ses parents dans son enfance pour se soustraire à toute dépendance. Il se rendit à Lyon, où il se détermina à être le conducteur d'un aveugle qui allait à Rome, et par cette démarche charitable et avantageuse à tous les deux, il fit le voyage sans frais. Sa facilité à manier le crayon lui donna entrée chez un marchand de tableaux, qui lui faisait copier les ouvrages des meilleurs maîtres. Les jeunes dessinateurs s'adressaient à lui pour faire retoucher leurs dessins. Lanfranc eut occasion de le connaître, et lui apprit à manier le pinceau. Perrier revint à Lyon, où il peignit le petit cloître des chartreux, et se fit un nom par son goût et ses talents pour son art. On lui conseilla de se fixer dans la capitale. Il vint donc à Paris, où Vouet l'employa, et le mit en réputation. Son mérite le fit nommer professeur de l'académie. Il mourut en 1650. Perrier s'est encore

distingué par ses gravures, qui

sont dans une manière nommée clair - obscur. On a de lui deux Recueils gravés à l'eau-forte: l'un est intitulé: Segmenta nobilium statuarum urbis Romæ, 1638, in-fol., 100 figures; l'autre a pour titre: Icones illustrium e marmore tabularum quæ Romæ exstant, 1645, in-fol. obl., 50 planches. On a aussi gravé d'après ce maître. On reproche à

mais on

Perrier quelques défauts de correction, et un coloris trop noir; ne peut disconvenir qu'il n'ait eut un bon goût de dessin, et que ses compositions ne soient belles, savantes et pleines de feu. Perrier a eu un neveu qui fut son élève, Guillaume PERRIER. Il peignait dans sa manière. L'église des minimes à Lyon offre plusieurs morceaux de sa main. Ce peintre mourut en 1655.

PERRIER (Charles du), poète latin, né à Aix, fils de Charles du Perrier, gentilhomme de Char les de Lorraine, duc de Guise, gouverneur de Provence, était neveu de François du Perrier, l'un des plus beaux esprits de son temps, à qui Malherbe adresse les belles stances qui commencent par ces vers:

Ta douleur, du Perrier, sera donc éternelle ?

Il fit ses délices, dès sa jeunesse, de la poésie latine, et il y réussit. Il donna souvent de bons avis à Santeuil, dont il était ami, mais il devint jaloux de la gloire de son disciple. Après avoir disputé avec chaleur l'un contre l'autre dans la conversation, ils en vinrent aux défis et aux écrits. Ils prirent pour arbitre Ménage, qui donna gain de causeà du Perrier, qu'il ne fait pas difficulté d'appeler le Prince des poètes lyriques. Il cultivait aussi la poésie française, et même avec assez de succès. L'académie le couronna deux fois, d'abord pour une Eglogue en 1681, puis en 1682 pour un Poème. Le Parnasse perdit du Perrier en mars 1692. On a de lui : 1o de fort belles Odes latines; 2o plusieurs Pièces en vers français; 3o des Traductions en vers de plusieurs écrits de Santeuil; car ces deux poètes demeurèrent

toujours amis, malgré leurs que... relles fréquentes. Du Perrier avait les travers des poètes, ainsi que les talents. Il était sans cesse occupé de ses vers, et il les récitait au premier venu. On prétend que Boileau lui lança ce trait dans son Art poétique.

Gardez-vous d'imiter ce rimeur furieux
Qui, de ses vains écrits lecteur harmonieux,
Aborde en récitant quiconque le salue,
Et poursuit de ses vers les passants dans la rue.

Mais ces vers n'étant que la co. pie du portrait que fait Horace du Recitator acerbus dans son Art poétique, rien ne prouve que le satirique français ait eu du. Perrier en vue.

PERRIER (François), avocat au parlement de Dijon, mort en 1700, à 55 ans, eut de la réputation dans sa province. On a de lui un Recueil d'Arrêts du parlement de Bourgogne, donné par Raviot, Dijon, 1735, 2 vol. infolio.

+PERRIER (Maric-Victorine, veuve), naquit vers 1780. Elle aimait la littérature, la cultiva, et a laissé les ouvrages suivants : 1° Récréations d'une bonne mère avec ses filles, ou Instructions morales sur chaque mois de l'année, à l'usage des jeunes demoiselles, Paris, 1804, 1 vol. in-12; 2° Adresse de Marie - Victorine aux Français, Lyon, 1815, in-8°, brochure de 24 à 25 pages, signée veuve Perrier, née Patras; une Comédie en une acte et en vers, jouée en 1820, avec succès, au théâtre de la porte Saint-Martin; 40 plusieurs poésies fugitives, insérées dans le Petit magasin des dames et dans d'autres recueils. Madame Perrier a laissé manuscrites plusieurs Comédies en un acte, et quelques poésies. Elle est morte à Paris au mois d'avril 1820. Madame Perrier ne

manquait pas d'un certain talent pour les vers; les siens sont faciles, harmonieux et élégants. Sa prose est d'un style correct; ses Récréations contiennent des leçons d'une saine morale, et eurent du succès.

†PERRIN (Pierre), né à Lyon: [il n'était point prêtre et ne possédait aucun bénéfice; mais pour avoir dans le monde un titre, il prit celui d'abbé, dont il adopta le costume.] Son esprit intrigant, plutôt que son mérite, lui procura la place d'introducteur des ambassadeurs près de Gaston de France, duc d'Orléans. Il imagina le premier de donner des Opéra français, à l'imitation de ceux d'Italie, et obtint le privilége du roi en 1669. L'abbé Perrin céda ce privilége à Lulli, en 1672. [C'est en 1659 qu'il donna le premier opéra à Issy: il parut avec le titre de Première comé die française, en musique, représentée en France: pastorale, 1659, in-4°. Cambert avait fait la musique de cette pastorale; il joignit ensuite à ce maître, Sourdeot et Champeron. Il composa avec ces trois co associés son Ariane, jouée après la mort de Mazarin, sur un théâtre élevé au jeu de paume de la rue Mazarine, vis-à-vis celle de Guénégaud.] On a de Perrin quatre Opéra des Odes, des Stances, des Élegies et un grand nombre d'autres Poésies, qui sont toutes du style de la Pucelle de Chapelain. Son Jeu de Poésie sur divers insectes est de tous ses ouvrages le moins mauvais, quoique la versification en soit incorrecte et traînante. Ce rimeur mourut en 1680. Ses différentes Poésies avaient été recueillies en 1661, en 3 volumes in-12. Il traduisit l'Eneide en vers héroïques, ou

:

plutôt gothiques, deux volumes in-4°.

PERRIN (Charles - Joseph), jésuite, né à Paris en 1690, mourut à Liége, en 1767. Après la disgrâce de sa société, M. l'archevêque de Paris lui donna un asile dans son palais. C'était un religieux qui édifiait autant par la régularité de sa conduite, qu'il touchait par la douceur de ses mœurs. Son zèle pour sa société expirante pensa lui être funeste. Il prêcha avec succès dans les villes les plus considérables de France, et surtout dans la capitale. Ses Sermons ont été publiés en 4 vol. in-12, à Liége, en 1768. On y trouve un style facile, mais quelquefois incorrect; des raisonnements pleins de force et de solidité un pathétique mêlé d'onction, des images vives et touchantes. - Il y a un François PERRIN, aussi jésuite, né à Rhodez en 1636, professeur de théologie dans l'université de Toulouse, puis dans celle de Strasbourg, dont on a Manuale theologicun, Paris 1714, 2 vol. in-8°. Il mourut à Toulouse, le 14 décembre 1716.

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PERRIN DEL VAGA. Voyez BUONACORSI.

PERRON (Jacques Davy du), cardinal, vit le jour dans le canton de Berne, en 1556, de parents calvinistes, d'une maison ancienne de Basse-Normandie. Elevé dans la religion protestante par Julien Davy, sou père, gentilhomme très savant, il apprit sous lui le latin et les mathématiques. Le jeune du Perron, né avec une facilité surprenante, étudia ensuite le grec, l'hébreu, la philosophie et les poètes. Philippe Desportes, abbé de Tyron, le fit connaître à Henri III, comme

un

prodige d'esprit et de mémoire, La grâce ayant éclairé son esprit, il abjura ses erreurs, et embrassa l'état ecclésiastique. Ses talents le firent choisir pour faire l'oraison funèbre de la reine d'Écosse, et celle de Ronsard. II ramena à l'Eglise catholique par la solidité de ses raisonnements, un grand nombre de protestants. Henri Sponde, depuis évêque de Pamiers, fut une de ses conquêtes. Ce prélat en fit depuis l'aveu solennel dans l'Epître dédicatoire de la première édition de son Abrégé des Annales de Baronius, qu'il dédia au cardinal du Perron. Les évêques demandèrent qu'un homme qui travaillait si utilement pour I'Eglise fût élevé aux dignités ecclésiastiques. En 1593, sous le pape Clément VIII, du Perron fut sacré à Rome évêque d'Evreux, par le cardinal de Joyeuse, archevêque de Rouen. En 1600, il eut avec Duplessis-Mornai, en présence du roi, une conférence publique, dans laquelle il triompha de ce seigneur calviniste. Il lui fit remarquer plus de 500

fautes dans son Traité contre l'Eucharistie. Mornai ne pouvant défendre les passages que son adversaire l'accusait d'avoir altérés, se retira promptement à Saumur. Voyez MORNAI.) Henri IV dit à cette occasion au duc de Sulli : « Le pape des pro>>>testants a été terrassé. »>-Sire, répondit le duc, c'est avec >> grande raison que vous appe» lez Mornai pape; car il fera du » Perron cardinal. » En effet, la victoire que ce dernier avait remportée, contribua beaucoup à lui procurer la pourpre romaine et Ï'archevêché de Sens. Henri IV l'envoya à Rome, où il assista aux congrégations de Auxiliis. Ce fut

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lui principalement qui détermina le pape à ne point donner de décision sur ces matières; ce qui était effectivement le parti le plus sage peut-être aussi toute décision dogmatique étaitelle impossible, vu que les deux partis se réunissaient dans le dernier résultat de la doctrine catholique. (Voyez LEMOS et MoLINA.) Quand il fut revenu en France, le roi l'employa à différentes affaires, et l'envoya une troisième fois à Rome, pour accommoder le différend de Paul V avec la république de Venise. On assure que ce pape avait taut de déférence pour les sentiments du cardinal du Perron, qu'il avait coutume de dire : « Prions » Dieu qu'il inspire le cardinal » du Perron, car il nous persua» dera tout ce qu'il voudra. » La faiblesse de sa santé lui fit demander son rappel en France. Après la mort de Henri IV, il employa tout son crédit pour empêcher qu'on ne fît rien qui déplût au siége de Rome. Il arrêta par sa vigilance les troubles qu'eût pu exciter dans l'Eglise

et dans l'état le livre du docteur Richer sur la puissance ecclésiastique et politique. Il assembla ses évêques suffragants à Paris, et dans cette assemblée on anathematisa l'auteur et l'ouvrage. Voyez RICHER.) Il mourut à Paris, le 5 septembre 1618, à 63 ans. On a dit de ce cardinal, par allusion à ses grands talents et aux défauts de sa constitu tion: « Qu'il ressemblait à la » statue de Nabuchodosor, dont » la tête d'or et la poitrine d'ai>> rain étaient portées sur des » pieds d'argile.» Effectivement, il avait de mauvaises jambes. Quelques écrivains passionnés ou incrédules eux-mêmes l'ont

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accusé d'irréligion, et avancent qu'après avoir prouvé l'exis»tence de Dieu en présence de » Henri III, il lui proposa de » prouver par des raisons aussi » fortes qu'il n'y en avait point. >> Cette anecdote absolument fabuleuse, est le fruit de la haine que les protestants et les richéristes portaient à ce redoutable adversaire. Les protestants ont cru surtout que ce conte pouvait servir à couvrir la défaite de Mornai, en montrant que ce cardinal prouvait le faux comme le vrai. Ses ouvrages ont été publiés en 5 vol. in fol., précédés de sa vie. Ils renferment: 1° la Réplique au roi de la GrandeBretagne ; 2o un Traité de l'Eucharistie contre DuplessisMornai, plusieurs autres Traites contre les hérétiques; 3° des Lettres, des Harangues, et diverses autres pièces en prose et en vers; 4° le Recueil de ses ambassades; 5° un Appendice de la doctrine de saint Augustin. Les livres de controverse de ce célèbre cardinal offrent une vaste érudition. Ila surpassé tous les controversistes dans l'art de pousser les preuves fondées sur des faits ou des textes, et de former des conclusions fermes et précises. Ses Poésies, placées autrefois parmi les meilleures productions du Parnasse français, ont perdu beaucoup par les vicissitudes qu'a subies la langue. On y trouve des stances amoureuses et des hymnes, des complaintes et des psaumes, etc. Le livre intitulé Perroniana fut composé par Christophe du Puy. Isaac Vossius le fit imprimer à La Haie, et Daillé à Rouen, en 1669, in-12. Il y en a eu dans la suite plusieurs autres éditions. Il n'y à aucune apparence que ce grand

cardinal ait dit toutes les puérilités qu'on lui attribue dans ce livres; tous ces Ana sont d'ailleurs, comme l'on sait, très suspects, et ne forment souvent que des recueils d'historiettes libres et ridicules, quelquefois indécentes, qu'un brochuraire oisif ou avide se plait à mettre sur le compte d'un homme célèbre. Du Puy avait fait cet inutile et en partie fabuleux recueil avant de renoncer aux sottises du siècle, et de se faire chartreux. Le cardinal du Perron faisait toujours imprimer ses livres deux fois, avant que de les mettre au grand jour : la 1 pour en distribuer des exemplaires à des juges éclairés; la 2", pour les donner au public, après avoir profité de leurs avis. Malgré cette précaution, presque aucun de ses livres ne lui a survécu, sinon ses livres de controverses, soit que le style ait vieilli, soit qu'on ait fait mieux après lui. On peut voir sa Vie, par Burigny, homme d'ailleurs peu propre à l'écrire fidèlement, vu ses étroites liaisons avec un parti ennemi de l'Eglise catholique, Paris, 1768, vol. in-12.

PERRON DE CASTERA (LouisAdrien du), mort résident de France en Pologne, le 28 août 1752, à 45 ans, a traduit en français le Neuwtonianisme des Dames, 2 vol. in-12, ouvrage superficiel, et rédigé dans des principes qui déjà ont cessé de paraître vrais; et la Lusiade du Camoëns, 3 vol. in-12, version éclipsée par celle qui a paru en 1776, 2 vol. in-8°. On a encore de Du Perron : 1o l'Histoire du Mont-Vésuve, in-12; 2o le Theátre espagnol, 1738, in-12, 2 tom.; 3° deux Comédies, etc. Son style est boursouflé et incorrect.

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