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d'ouvriers libres: cet homme surveille la mine et la fonderie, suit les procès au sujet des limites et des mines, paye les impositions à la couronne, tâche de trouver les moyens de transport les moins coûteux, et enrichit son maître. Quoiqu'il y ait dans les forges qui appartiennent à des particuliers des gens libres, par exemple des marchands, des officiers retirés, cependant le Prikachtchik est presque toujours un esclave, et dirige avec quelques adjoints de grandes mines dont le produit quelquefois excède cinq cent mille roubles, tel que celui des mines des Démidof et Jakoblef: partout ailleurs qu'en Russie, elles seraient régies par une foule de conseillers, d'assesseurs et de secrétaires.

par

Les travaux des mines de la couronne et des particuliers se font des maîtres ouvriers de la couronne, ou par des paysans attachés aux mines, ou enfin par des travailleurs libres. La classe des maîtres ouvriers est formée de paysans de la couronne, ou de gens destinés aux recrues que l'on emploie dans les mines. Ils appartiennent, ainsi que leur postérité, pour toujours aux mines des particuliers ou de la couronne où ils sont inscrits, et ils

sont entretenus aux frais de la couronne ou du possesseur de la mine. Pour faire connaître les travaux et le sort de cette classe d'hommes, nous rapporterons quelques traits de la description qu'en a donnée un officier distingue, qui a été long-temps employé dans les mines de Kolyvan.

Tous les ouvriers des mines et des forges sont nommés maîtres - ouvriers, mais on les divise en maîtres, sous-maîtres, élèves, sappeurs, garçons, conducteurs, laveurs et ceux qui font le départ. Leur traitement dépend de leur adresse : il est annuellement de 15 à 30 roubles. Les provisions qu'ils reçoivent du magasin sont déduites sur ce traitement.

par

Le nombre des maîtres-ouvriers des mines de Kolyvan est de 4186, y compris ceux' qui foiblesse d'âge ou par maladies sont hors d'état de travailler, les infirmiers dans les hôpitaux, les inspecteurs, les denchtchiki ou domestiques des officiers: ce nombre diminue encore tous les ans par la désertion. Une partie est encore employée aux travaux extraordinaide sorte qu'il y en a très-peu qui exploi tent les mines: à Schlangenberg par exemple, ils sont à peu près 600 hommes. Le nombre

res,

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des enfans d'ouvriers est de 1029: ils sont instruits dans des écoles, et on les envoie, quand ils sont grands, à la table de triage. L'augmentation du nombre des ouvriers se fait à raison des recrues; mais comme les travaux des mines sont très-préjudiciables à la santé et abrègent la durée de la vie, on remplace à peine la perte que l'on a faite. Les enfans des mineurs forment la vraie augmentation, car un garçon de 14 ans né dans les mines est plus adroit qu'un paysan avancé en âge. La discipline, le traitement et les punitions des mineurs sont presqu'entièrement militaires. Leur avancement est le même que celui des bas-officiers de l'armée, leurs crimes sont jugés par un conseil de guerre, et les officiers des mines y assistent, lorsque leur présence est nécessaire.

Comme il n'y a dans les monts Altais ni artisans ni marchés où l'on puisse acheter les choses nécessaires à la vie, les mineurs sont obligés de pourvoir à tous leurs besoins; ce qui leur serait impossible, s'il n'y avait pas un grand nombre de jours de fêtes, où ils sont dispensés des travaux publics. Leur premier soin est d'avoir une petite maison; ils

cultivent tout auprès un petit jardin, et élèvent les bestiaux dont ils ont besoin.

Si l'on com

mence à ouvrir une mine à quelque distance, ils logent pendant quelque temps sous une cabane construite avec des perches et couverte de gazon, ou ils se creusent sous terre un logement et un four. Aussitôt que la mine paraît riche, ils construisent une maison dans les environs, y conduisent leurs bestiaux et y portent tout ce qu'ils possèdent. C'est ainsi qu'on voit s'élever des villages habités par des mineurs dans des bois inaccessibles, ou au milieu des steppes les plus arides. Si ces mines sont abandonnées, le mineur n'y perd rien; car il vend aisément sa maison à un paysan, qui la transporte quelquefois à trente ou quarante verstes du lieu où elle est bâtie.

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En général les mineurs des monts Altais, surtout ceux qui le sont d'origine, se trouvent bien partout et sont propres à tout. Avec un peu de soin on en forme en peu de temps des gens industrieux et habiles. Il y a des jeunes gens qui copient les plus jolis dessins; de simples forgerons font des horloges de métal. S'il se présente quelque occasion de gagner

de l'argent, cet attrait réveille l'esprit d'industrie, que leurs pénibles travaux paraissent plus propres à étouffer qu'à développer. Presque tous les mineurs d'Altai sont grands chasseurs, bons cavaliers, et, en cas de nécessité, ce sont les meilleurs soldats.

Les paysans attachés aux mines, dont il a été souvent question dans ce chapitre, ont eu l'origine suivante. Dans le commencement, la plupart des mines furent ouvertes sur des terres appartenantes à la couronne, ou elles furent exploitées par des personnes qui n'étaient point nobles et n'avaient par conséquent point de serfs. Pour suppléer aux ouvriers qui étaient alors d'autant plus rares que l'on n'en trouvait point de libres, et pour encourager l'exploitation des mines, le souverain ordonna que les paysans de la couronne qui habitaient le voisinage des mines, seraient obligés d'y travailler, et le possesseur de la mine à laquelle ils étaient attachés fut chargé de payer leur capitation. On donna donc un nombre suffisant d'ouvriers aux mines des particuliers qui avaient de ces paysans dans leur voisinage, et, jusqu'à l'année 1779, on les employa à tous les travaux et pendant toutes les

saisons.

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