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APOSTROPHE DE SATAN AU SOLEIL.

Translation.

O TOI, qui, couronné de la plus haute gloire,
Parais l'âme et le dieu de ce monde nouveau,
Toi, dont le seul aspect, t'assurant la victoire,
Des astres pâlissans efface le flambeau,
Ce n'est pas en ami, Soleil, que je t'appelle,
C'est pour te dévouer à la haine éternelle
Qu'en mon cœur ulcéré fait naître ton éclat,
Eclat injurieux, dont l'honneur me rappelle
Les honneurs trop flétris de mon premier état.
Tu me voyais briller au dessus de ta sphère;
J'y brillerais toujours sans mon orgueil fatal.
L'orgueil, l'ambition encor plus téméraire,
Me firent attaquer, trop impuissant rival,
L'être qui dans les cieux ne peut avoir d'égal.
Eh! pourquoi l'ai-je pu payer d'un tel salaire,
Moi, l'œuvre de ses mains, comblé de ses bienfaits
Me les reprochait-il? quel mattre fut jamais
Plus facile à servir? et quelle récompense
Exigeait-il de moi que ma reconnaissance ?
Retour, hélas! trop du. Mais il a vu ses dons
Dans mes coupables mains convertis en poisons
N'engendrer dans mon cœur que révolte et que
haine.

Ebloui de mon rang, je crus qu'encore un pas
Jusqu'au rang le plus haut m'éleverait sans peine,
Epargnant pour jamais à mon âme hautaine
L'ennui de ces devoirs qui pèsent aux ingrats.
J'oubliai des bienfaits qui ne tarissaient pas;
L'aveu seul m'en parut un poids insupportable.
Quel était donc ce poids que j'osai rejeter?
Reconnaître la dette eût été l'acquitter.
Ah! moins favorisé j'eusse été moins coupable.
Plus heureux aux bas rangs, un espoir limité

Eût rendu mon orgueil moins fier et plus traitable

SATAN'S SPEECH TO THE SUN.

O THOU, that, with surpassing glory crown'd,
Look'st from thy sole dominion, like the god
Of this new world; at whose sight all the stars
Hide their diminish'd heads; to thee I call,
But with no friendly voice, and add thy name,
O Sun! to tell thee how I hate thy beams,
That bring to my remembrance from what state
I fell, how glorious once above thy sphere;
Till pride and worse ambition threw me down,
Warring in Heav'n against Heav'n's matchless
King.

Ah, wherefore! he deserv'd no such return
From me, whom he created what I was
In that bright eminence, and with his good
Upbraided none; nor was his service hard.
What could be less than to afford him praise,
The easiest recompence, and pay him thanks?
How due! yet all his good prov'd ill in me,
And wrought but malice; lifted up so high
I disdain'd subjection, and thought one step higher
Would set me highest, and in a moment quit
The debt immense of endless gratitude;
So burdensome still paying, still to owe,-
Forgetful what from him I still receiv'd;
And understood not that a grateful mind
By owning owes not, but still pays, at once
Indebted and discharg'd! what burthen then
O, had his pow'rful destiny ordain'd
Me some inferior Angel, I had stood
Then happy; no unbounded hope had rais'd
Ambition. Yet why not? some other Power
As great might have aspir'd, and me, though mean,
Drawn to his part; but other pow'rs as great.

THE BOOK OF VERSIONS.

Non, non, quelque révolte ailleurs eût éclaté ; Quelqu' esprit du haut rang eût eu ma même audace,

Et j'eusse partagé son crime et sa disgrace. Mais que dis-je? a-t-on vu parmi les séraphins S'élever quelque voix impie et criminelle? Soutenus par la grâce, ou guidés par le zèle, Tous paisibles et purs bénissent leurs destins. Ai-je mêmes secours pour demeurer sans tache? Oui, je les avais tous. Eh! qui peut m'excuser? Ce même amour du ciel, dont la faveur s'attache A tous également, sans jamais s'épuiser,

C'est lui qui m'a perdu, lui qu'il faut accuser. Maudit soi cet amour, qui semblable à la haine, Comme elle me dévoue à l'éternelle peine!.. Ah! plutôt, sois maudit, toi, qui voulus choisir Le parti d'un orgueil source de repentir! Malheureux que je suis! où puis-je fuir encore Le supplice infini d'un désespoir sans fin? Où fuirai-je l'Enfer? je le porte en mon sein; Je suis l'Enfer moi-même, et son feu me dévore. Aux abîmes de mort roulant avec horreur Le plus affreux de tous est celui de mon cœur. C'est là qu'est mon enfer; celui de la souffrance N'est en comparaison qu'un paradis pour Coupable audacieux! à la fin repens toi. N'est il plus de pardon? N'est-il plus d'espérance? Il en est (mais l'orgueil n'en peut souffrir le nom); Il en est dans la honte et la soumission.

moi.

Etait-ce là l'espoir de tant d'esprits rebelles
Que j'ai faits compagnons de mes peines cruelles ?
Leur-avais je promis honte et confusion?

Ne me vantais-je pas dans mes promesses folles,
De les rendre avec moi vainqueurs du Tout Puis-
sant?

Ils ignorent combien mes vœux étaient frivoles,

Et sous quels coups affreux leur chef est gémissant

Fell not, but stand unshaken, from within
Or from without, to all temptations arm'd.

Had'st thou the same free will, and pow'r to stand? Thou had'st: whom hast thou then, or what, t' ac

cuse,

But Heav'n's free love, dealt equally to all?
But then his love accurs'd, since love or hate,
To me alike it deals cternal woe.

Nay, curs'd be thou; since against his thy will
Chose freely what it now so justly rues.
Me miserable! which way shall I fly
Infinite wrath, and infinite despair?
Which way I fly is Hell; myself am Hell;
And, in the lowest deep, a lower deep,
Still threat'ning to devour me, opens wide,
To which the Hell I suffer seems a Heav'n.
O then, at last relent: is there no place
Left for repentance, none for pardon left?
None left but by submission; and that word
Disdain forbids me, and my dread of shame
Among the Spirits beneath, whom I seduc'd
With other promises, and other vaunts
Than to submit, boasting I could subdue
Th' Omnipotent. Ah me! they little know
How dearly I abide that boast so vain,
Under what torments inwardly I groan
While they adore me on the throne of Hell,
With diadem and sceptre high advanc'd,
The lower still I fall, only supreme
In misery; such joy ambition finds.
But, say I could repent, and could obtain,
By acts of grace, my former state, how soon

Would height recall high thoughts, how soon unsay
What feign'd submission swore? Ease would recant
Vows made in pain, as violent and void.
For never can true reconcilement grow,

Where wounds of deadly hate have pierc'd so deep,

Tandis que tout l'enfer l'adore sur un trône:
Le sceptre en main, le front paré d'une couronne
Plus on m'elève, et plus je me sens abaissé;

e premier, par les maux dont je suis terrassé.
Hélas! tels sont les fruits que l'ambition donne.
Ah! si le repentir, obtenant mon pardon,
Me remettait au rang de ma grandeur passée,
Mon indomptable orgueil, exaltant ma pensée,
D'un hommage forcé retracterait le don.
Tout hommage forcé n'est qu'un feint abandon,
Non, il n'est plus d'espoir d'un retour véritable
Quand le trait de la haine a percé troj avant.
Plus criminel encore après un vain serment,
Ma chûte n'en serait que plus épouvantable
Il ne l'ignore pas, le tyran qui m'accable:
La paix que mon orgueil répugne à demander,
Il répugne peut-être autant à l'accorder:
Il a porté l'arrêt, l'arrêt irrévocable.

Déchus de tous nos droits, exilés et maudits,
Nous voyons de ses mains sortir un nouvel être,
Que pour nous remplacer sa vengeance a fait naître.
A l'homme, objet nouveau de ses soins favoris,
Il crée un nouveau monde, un nouveau paradis.
Tout bien est donc perdu, toute espérance éteinte ?
Avec elle s'éteint tout remords, toute crainte.
Mal, tu seras mon bien: que par toi mon rival
Voie enfin mon empire être du sien l'égal.
Que dis-je? mon pouvoir l'emportera peut-être :
L'homme et son paradis vont bientôt le connaître.
Le Duc de Nivernois, du Paradis Perdu.
Euvres Posthumes.

Note-We have preferred this Translation of the Paradise Lost, on account of its being more literal than Delille's, and consequently better suiting our purpose; but we would recommend the perusal of the latter, in preference to any other. In Delille's lines the reader will often find a poetical enthusiasm, and beauty of description, worthy of Milton himself.

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