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Seulement au printemps, quand Flore dans les plaines,

Faisait taire des vents les bruyantes haleines, Quatre bœufs attelés, d'un pas tranquille et lent, Promenaient dans Paris le monarque indolent.

Ce doux siècle n'est plus. Le ciel impitoyable A placé sur le trône un prince infatigable:

Il brave mes douceurs : il est sourd à ma voix. Tous les jours il m'éveille au bruit de ses exploits.

Rien ne peut arrêter sa vigilante audace,

L'été n'a point de feux, l'hiver n'a point de glace.
Et voici qu'un lutrin prêt à tout renverser,

D'un séjour si chéri vient encor me chasser.
O toi, de mon repos, compagne aimable et sombre,
A de si noirs forfaits prêteras-tu ton ombre?
Ah! Nuit, si tant de fois......La Mollese op-
pressée,

Dans sa bouche à ce mot sent sa langue glacée,
Et lasse de parler, succombant sous l'effort,
Soupire, étend les bras, ferme l'œil et s'endort.

Boileau.

DESCRIPTION DE L'IDYLLE, DE L'ELEGIE,
ET DE L'ODE.

Art Poétique.

TELLE qu'une bergère au plus beau jour de fête,
De superbes rubis ne charge point sa tête,
Et sans mêler à l'or l'éclat des diamans,

Cueille en un champ voisin ses plus beaux ornemens:
Telle, aimable en son air, et simple dans son style
Doit éclater sans pompe une élégante Idylle.

No anxious cares did nigh the palace creep;
But day and night was one continu'd sleep,
Except the vernal month, when Flora gilds
The cheerful vallies, and the smiling hills,
When the loud North his airy rule resigns
To gentle zephirs, and more peaceful winds,
Four oxen drew with slow and silent feet
Th' unactive monarch to some country-seat.

But 'tis no more: That golden age is gone; And an unweary'd Princess fills Britannia's throne. Each day she frights me with the noise of arms, Slights my embraces, and defies my charms. Lo! now a Desk, a fatal foe to peace,

repose,

Strives to dislodge me from my ancient ease.
And wilt thou, Night, lend thy officious aid
To cover crimes, far blacker than thy shade?
Wilt thou, dear partner of my lov'd
Abet my ruin, and protect my foes?
Ah! suffer not at least.... Here Sloth, opprest
With length of words, and want of grateful rest,
Sunk down: His strength forsook the stupid god,
And to repose resign'd the lifeless load.

Rowe.

DESCRIPTION OF THE PASTORAL, ELEGY, AND ODE. Translation.

As, on a gaudy day, some shepherdess

Does not her head with sparkling diamonds dress,
But, without gold, or pearl, or costly scents,
Gathers from neighb'ring fields her ornaments;
So, unaffected, is the Pastoral strain,
Fair, without pomp, and elegantly plain.
Its humble method nothing has of fierce,
And hates the rattling of Lee's tragic verse:

Son ton simple et naïf n'a rien de fastueux,
Et n'aime point l'orgueil d'un vers présomptueux.
Il faut que sa douceur flatte, chatouille, éveille,
Et jamais de grands mots n'épouvante l'oreille.
Mais souvent dans ce style un rimeur aux abois,
Jète là, de dépit, la flûte et le hautbois;

Et follement pompeux dans sa verve indiscrète,
Au milieu d'une Eclogue entonne la trompette.
De de l'écouter Pan fuit dans les roseaux,
peur
Et les Nymphes, d'effroi, se cachent dans les eaux.

D'un ton un peu plus haut, mais pourtant sans audace,

La plaintive Elégie, en longs habits de deuil,
Sait, les cheveux épars, gémir sur un cercueil.
Elie peint des amans la joie et la tristesse,
Flatte, menace, irrite, appaise une maîtresse.

L'Ode avec plus d'éclat, et non moins d'énergie, Elevant jusqu'au ciel son vol ambitieux, Entretient dans ses vers commerce avec les dieux. Aux athlètes dans Pise elle ouvre la barrière, Chante un vainqueur poudreux au bout de la carrière; Mène Achille tremblant aux bords du Simoïs, Ou fait fléchir l'Escaut sous le joug de Louis. Tantôt comme une abeille ardente à son ouvrage, Elle s'en va de fleurs dépouiller le rivage: Elle peint les festins, les danses, et les ris; Vante un baiser cueilli sur les lèvres d'Iris, Qui mollement résiste, et par un doux caprice Quelquefois le refuse, afin qu'on le ravisse. Son style impétueux souvent marche au hasard, Chez elle un beau désordre est un effet de l'art.

Boileau.

There, native beauty pleases and excites,
And never with harsh sounds the ear affrights.
But in this style a rhymer, often spent,
In rage throws by his rural instrument,
And vainly, when disorder'd thoughts abound,
Amidst the Eclogue makes the trumpet sound:
Pan flies alarm'd, into the neighb'ring woods,
And frighted Nymphs dive down into the floods.
The Elegy requires a nobler flight;

Should soar a higher pitch, but keep in sight;
In plaintive dirges, and a mournful style,
With unbound air weeps at a funeral pile;
It paints a lover's torments and delights,
How the Nymph flatters, threatens, and invites.
But the bold Ode demands a stronger turn,
For there the Muse must with all Phoebus burn,
Mounting to Heav'n in her ambitious flight,
Among the gods and heroes takes delight:
Of Pisa's wrestlers tells the sinewy force,
And sings the dusty conqueror's glorious course
On Danube's banks victorious Marlbro's seen,
And Spanish Iber bows to Britain's Queen;
Sometimes she flies, like an industrious bee,
And robs the flow'rs by nature's chemistry:
Describes the shepherd's dances, feasts, and bliss,
And boast from Phyllis to surprise a kiss,
When gently she resists with feign'd remorse,
That what she grants may seem to be by force:
Her generous style will oft at random start,
And by a brave disorder show her art

Rowe

Traduction.

J'AIME à te contempler, lugubre et calme nuit,
Quand la triste Phoebé, d'un nuage voilée,
Paraît avec regret, du cours qu'elle poursuit
Réfléchir ses rayons sur la mer agitée.
Alors, enseveli dans sa morne douleur,
L'infortuné se plaint à la froide nature;
Il dit aux élémens les peines de son cœur,
Et se croit soulagé des chagrins qu'il endure.
Hélas! je l'ai perdu ce repos désiré !

Mais, ô Nuit! tu me plais, et mon âme affaiblie,
Que soulage un instant ta douce obscurité,
Trouve un secret plaisir dans sa mélancolie:
Sur les ailes des vents, emportés vers les cieux,
Peut-être, mes regrets attendriront les dieux.

Cherpilloud.

RENCONTRE DE ARMEES DE CESAR ET DE POMPEE. La Pharsale de Lucain.

Traduction.

D'UN intervalle étroit les deux camps divisés
Aux crimes d'un combat se montrent disposés,
Tant qu' arrêtant les yeux sur le parti contraire,
L'un y remarque un fils, l'autre y découvre un père
Et qu' enfin revenus de leurs égaremens

Ils comprennent l'horreur des civils mouvemens.
D'abord, sous la rigueur d'un pouvoir tyrannique,
Par de simples regards la nature s'explique,
Et n'osant se soustraire à ce joug odieux,
Fait parler seulement et le geste et les yeux,
Mais par un saint instinct que sa main nous imprime,
Bientôt le faux devoir fait place au légitime,

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