Et couronné par Jeanneton Dit-on. Oh! oh! oh! oh! ah! ah! ah! ah! Quel bon petit roi c'était là! Il faisait ses quatre repas Il n'avait de goût onéreux Qu'une soif un peu vive;, Sur chaque muid levait un pot Aux filles de bonnes maisons Comme il avait su plaire, Il n'agrandit point ses états, Fut un voisin commode, Et, modèle des potentats, On conserve encor le portrait De ce digne et bon prince: C'est l'enseigne d'un cabaret Oh! oh! oh! oh! ah! ah! ah! ah! Quel bon petit roi c'était là! La, la. Pierre-Jean de Béranger [1780-1857] FANTAISIE * IL est un air pour qui je donnerais Tout Rossini, tout Mozart, tout Weber, Un air très vieux, languissant et funèbre, Qui pour moi seul a des charmes secrets. Or, chaque fois que je viens à l'entendre, De deux cents ans mon âme rajeunit; C'est sous Louis treize . . . et je crois voir s'étendre Puis un château de brigue à coins de pierres, Puis une dame à sa haute fenêtre, Blonde, aux yeux noirs, en ses habits anciens Que dans une autre existence, peut-être, J'ai déjà vue! . . . et dont je me souviens. Gérard de Nerval [1808-1855] L'ART OUI, l'œuvre sort plus belle D'une forme au travail Rebelle, Vers, marbre, onyx, email. * For a translation of this poem see page 920. Point de contraintes fausses! Mais que, pour marcher droit, Tu chausses, Muse, un cothurne étroit. Fi du rhythme commode, Comme un soulier trop grand, Du mode Que tout pied quitte et prend! Statuaire, repousse Le pouce Quand flotte ailleurs l'esprit. Lutte avec le carrare, Avec le paros dur Et rare, Gardiens du contour pur; Emprunte à Syracuse Son bronze où fermement S'accuse Le trait fier et charmant; D'une main délicate Poursuis dans un filon D'agate Le profil d'Apollon.. Peintre, fuis l'aquarelle, Trop frêle Au four de l'émailleur. Fais les sirènes bleues, Leurs queues, Les monstres des blasons; Dans son nimbe trilobe La Vierge et son Jésus, Le globe Avec la croix dessus. JE me fais vieux, j'ai soixante ans; J'ai travaillé toute ma vie Sans avoir, durant ce temps, De bonheur complet pour personne. Mon voeu ne s'accomplira pas: On voit la ville de là-haut Derrière les montagnes bleues, Il faut faire cinq grandes lieues, Ah, si la vendange était bonne! Je ne verrai pas Carcassonne! *For a translation of this poem see page 438, On dit qu'on y voit tous les jours, En habits neufs, en robes blanches. Le vicaire a cent fois raison: זי C'est des imprudents que nous sommes. Il disait dans son oraison Que l'ambition perd les hommes. Si je pouvois trouver pourtant Deux jours sur la fin de l'automneMon Dieu, que je mourrais content Après avoir vu Carcassonne! Mon Dieu, mon Dieu, pardonnez-moi Ainsi chantait près de Limoux Mais, que le Bon Dieu lui pardonne, Il mourut à moitié chemin: Il n'a jamais vu Carcassonne! Gustave Nadaud [1820-1893] |