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croître rapidement. Pour rétablir le crédit, Cabarrus imagina de mettre des billets royaux portant intérêt. Ce papier-monnaie réussit parfaitement, et peu de temps après, quand on créa la banque de Saint-Charles, la direction en fut confiée à Cabarrus, qui en avait formé le plan. Au moyen d'un droit de commission, cette banque procède à l'acquittement de toutes les obligations souscrites par le trésor, pour les divers services de l'armée, de l'intérieur et de l'extérieur. Ces opérations, d'une utilité reconnue, avaient donné à Cabarrus une grande influence; mais la mort de Charles III y mit un terme, en occasionant le renouvellement du ministère. Arrêté en 1790, au mois de juin, par Llerena, il passa deux années dans les prisons: ce n'est qu'en 1792 qu'il fut jugé et acquitté. Il reçut alors, avec le titre de comte, une mission pour le congrès de Rastadt, où il eut le rang de ministre plénipotentiaire. Plus tard, il fut choisi pour l'ambassade de France, après avoir contribué, depuis son retour en Espagne, à la réforme de l'administration. Mais le directoire, n'ignorant pas les relations de Cabarrus avec la faction dite de Clichy, le refusa, sous le prétexte qu'il était né Français. Le prince de la Paix, qui ne le voyait pas à Madrid sans quelque inquiétude, le fit envoyer en Hollande, où il resta jusqu'à l'abdication de Charles IV. Rentré en Espagne, il fut nommé ministre des finances par Ferdinand VII, et il le suivit à Bayonne au mois d'avril 1808. Les événemens qui placèrent Jo

seph Bonaparte sur le trône des Espagnes, ne renversèrent pointla fortune du comte de Cabarrus ; il fut confirmé dans le ministère, ainsi que dans la direction de la banque de Saint-Charles, et il se vit décoré du grand-cordon de l'ordre Royal, créé en 1809, par le frère de Napoléon. Il est mort le 27 avril 1820, avec la réputation d'un très-bon administrateur en finances.

CACAULT (FRANÇOIS), naquit à Nantes, en 1742. Après avoir fait de bonnes études, il vint à Paris à l'âge de 20 ans, et à 22, fut nommé professeur de mathématiques à l'Ecole-Militaire. Un duel, où il blessa son adversaire, le força de quitter la France, ca 1769. Il parcourut l'Italie, et arriva à Rome dans un dénûment complet. Il était loin de se douter qu'il dût un jour représenter une des grandes nations de l'Europe, dans cette même ville où il entrait à pied, et peu chargé de bagage. Lors de son retour en France, en 1775, le maréchal d'Aubeterre se l'attacha comme secrétaire particulier, l'emmena en Italie, et le fit nommer, en 1785, secrétaire de l'ambassade de Naples, sous le baron de Talleyrand, auquel Cacault succéda dans cette résidence, en1791. De retour à Paris, il reçut l'ordre de partir pour Rome, après l'assassinat de Basseville; mais toutes les communications étant coupées par les troupes de la coalition, il ne put arriverà sanouvelle destination. S'étant arrêté en Toscane, il employa utilement le temps de son séjour à Florence, et détermina le grandduc à se détacher de la coalition.

Nommé ministre à Gênes, il signa conjointement avec le général Bonaparte, le traité de Tolentino. Chargé d'en surveiller l'exécution, il se rendit à cet effet à Rome, à Florence, puis fut rappelé à Paris, où il revint, ne rapportant de ses missions, qu'une pauvreté honorable et quelques tableaux. Nommé, en 1798, député au conseil des cinq-cents, par le département de la Loire-Inférieure, il y présenta, le 15 août, un projet sur le mode de reddition de compte des ministres, et proposa la dégradation civique pour ceux qui ne se soumettraient pas à cette mesure. Après la révolution du 18 brumaire an 8, Cacault fut membre du nouveau corps-législatif; et renommé l'année suivante à l'ambassade de Rome, il y resta jusqu'en juillet 1803, époque où le cardinal Fesch vint lui succéder. Revenu en France, il fut nommé président du collège électoral de la Loire-Inférieure. Élu candidat par ce département, il entra au sénat-conservateur le 6 avril 1803, et mourut à Clisson, le 1 octobre 1805. Cacault, qui avait pris en Italie le goût des arts, laissa un beau cabinet des divers morceaux qu'il en avait rapportés. On a de lui les ouvrages suivans, qui ne se distinguent ni par l'élégance, ni même par la correction du style: 1° Poésies lyriques de Ramler, traduites de l'allemand, Berlin, 1777, in-12; 2° Dramaturgie, ou Observations critiques sur plusieurs pièces de théâtre, traduite de l'allemand de Lessing, par un Français, et publié par M. J., Paris, 1785, 2 vol, in-12. Enfin plusieurs

Rapports au conseil des cinqcents.

CADET-GASSICOURT(LOUISCLAUDE), pharmacien, né à Paris le 24 juillet 1731. Son père, chirurgien habile, mourut à la fleur de l'âge, laissant treize enfans, une veuve, et dix-huit francs pour toute fortune. Chacun des voisins de cadet voulait adopter un de ses enfans. Saint-Laurent, trésorier des colonies, ami zélé et puissant, se chargea de pourvoir à l'éducation de ces intéressans orphelins, et de donner à chacun d'eux une destination conforme à ses talens. Louis-Claude s'étant voué à l'étude de la pharmacie, y fit des progrès assez rapides pour être nommé, à 22 ans, apothicaire-major des Invalides. Quatre ans après, en 1757, il fut apothicaire-major des armées d'Allemagne, et ensuite de l'armée française en Portugal. Il se fit bientôt distinguer par ses connaissances en chimie. En 1766, l'académie des sciences de Paris le reçut au nombre de ses membres pour professer la chimie. Les académies de Lyon, Toulouse et Bruxelles s'empressèrent successivement de l'adopter pour associé ou pour correspondant. Les mémoires de l'académie des sciences de Paris, le journal de physique et d'autres recueils savans, ont été enrichis par Cadet de vingt-trois mémoires ou dissertations sur la chimie. On y trouve des observations précieuses sur la possibilité d'extraire le vitriol de l'espèce de charbon de terre qu'on exploite dans le Rouergue. Cadet a analysé huit espèces d'eau minérales jusqu'alors inconnues. Il a donné les

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M. Cadet de Gassicourt.

Fremy del et Sculp

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moyens de préparer l'éther à des frais très-modiques; ce médicament, dont l'usage est tous les jours plus répandu, et pourrait même l'être trop, depuis que les dames se sont familiarisées avec ce puissant anti-spasmodique, déguisé sous le nom de gouttes anodines d'Hoffmann. Cadet a rédigé, pour l'Encyclopédie, les articles bile et borax. Il a fait imprimer séparément : 1° Une Analyse des eaux minérales de Passy; 2o des Observations en réponse à Baumé, sur la préparation de l'éther, sur le mercure, etc.; 3° enfin des Expériences sur la nature du diamant. Dans ces expériences sur le diamant, faites avec les célèbres Macquer et Lavoisier, Cadet eut l'avantage de mettre hors de doute la combustion parfaite de ce corps singulier, et d'apercevoir l'enduit charbonneux dont se couvre le diamant lorsqu'il ne se combine que partiellement avec le gaz oxigène. Le désir d'étendre, avec le domaine des sciences, nos relations commerciales, avait fait conduire en France deux jeunes Chinois, auxquels Louis XV voulut qu'on apprît la chimie. Cadet fut chargé de la leur enseigner, et reçut pour prix de ce service la seule récompense qui pouvait le flatter, la Collection complète des mémoires de l'académie des sciences. Un livre instructif paie les travaux d'un savant, comme une armure brillante les exploits d'un guerrier. Les falsifications que des commerçans avides se permettaient d'exercer sur les vins, les vinaigres et les tabacs, ayant éveillé la sollicitude du gouver

nement, Cadet fut chargé de découvrir ces fraudes pernicieuses; il donna à la fois les moyens de les reconnaître, d'en arrêter le cours, et de remédier aux abus qu'elles entraînaient. Cadet a travaillé sur la confection du verre et de la porcelaine avec le célèbre Fontanieu; il a laissé dans son laboratoire un grand nombre d'échantillons qui attestent l'importance des essais qu'il a faits dans ce genre. Ces travaux le firent nominer commissaire du roi pour la chimie, près la manufacture de Sèvres. Le public accorda toujours à Cadet une confiance proportionnée à ses talens. On sait quel succès ont constamment obtenu les médicamens qu'il préparait. Ce succès a été trop durable pour qu'on pût l'attribuer à la mode ou à un engouement irréfléchi. Son cabinet était ouvert, à toute heure, à l'humanité souffrante qui venait réclamer ses salutaires avis. Ses consultations étaient toujours gratuites; il y joignait souvent, pour les pauvres, le don des médicamens qu'il avait prescrits, et quelquefois de l'argent pour qu'ils se procurassent le bouillon, le linge, ou telle autre commodité que réclamaient leurs maladies. Un homme, dont l'habit et le maintien annonçaient tout au plus un pauvre habitant de la campagne, se présente un jour chez Cadet pour le consulter. Le malade est accueilli avec autant d'égards et de politesse, de patience et d'attention, que si son extérieur eût promis le plus riche salaire; il se retire surpris et pénétré de reconnaissance. Le soir du même jour, une voiture s'ar

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